CONCEPTS DE DROIT CONSTITUTIONNEL GÉNÉRAL
Les
Etats-Unis
Plan du cours sur les E.U. (USA) :
Nature du régime
Fonctionnement du régime
- l'Exécutif
désignation du président
compétences présidentielles
instruments de l'action présidentielle
- le Congrès
le processus de création de la loi
le processus de contrôle de l'Exécutif
- la Cour Suprême
Supplément :
- les élections présidentielles 2012 :
- les élections présidentielles 2008
- des articles, documents sur l'actualité des E.U.
- les sites
web sur les E.U :
La Présidence
Le Congrès et sa bibliothèque juridique :
---La Chambre des représentants
---Le Sénat
Les archives américaines
La Cour suprême :
Description (Cahier
du Conseil constitutionnel)
Décisions
La Cour Suprême (décisions
classées)
Le département de la Justice
+ Le site de " The Constitution Society " qui contient de nombreux ouvrages classiques sur le droit constitutionnel américain à télécharger à cette adresse.
L'histoire
explique la nature du régime
En 1787, les constituants américains ont pris pour modèle
la Monarchie limitée anglaise du début du XVIIIe siècle
(telle qu'elle a fonctionné exactement sous Guillaume d'Orange, puis
la Reine Anne de 1689 à 1714). C'est alors un régime de balance
des pouvoirs qui sera théorisé plus tard par Montesquieu. Il est
caractérisé par le fait :
- d'une part que le monarque gouverne encore
- d'autre part que le Parlement légifère sans pouvoir renverser
les ministres du Monarque.
En conséquence, les Américains ont photographié une phase
transitoire de l'évolution du régime anglais qui à l'époque
n'est pas encore parlementaire au sens moderne, c'est-à-dire qui ne connaît
pas la responsabilité politique.
Il est étonnant de constater que les constituants
américains ne se sont pas aperçus ou n'ont pas tenu
compte du fait que dès 1782 les Anglais avaient inventé
la motion de censure. Il n'ont donc pas importé cette
institution ; s'ils l'avaient fait, ils auraient peut être
crée un régime parlementaire aux États-Unis. Cela
n'a pas été le cas. Ils n'ont imité qu'une forme
archaïque de séparation des pouvoirs :
-- collaboration minimale
-- facultés d'empêcher.
Attention, la séparation mise en place contrairement
à ce que prétendent encore certains auteurs n'est pas une séparation
absolue, rigide, etc. dans son principe qui serait assouplie en pratique. Sur
la séparation des pouvoirs, lisez C. Einsemann et M. Troper. Et puis
la décision USA v. Nixon 24/7/74
: "En définissant la structure de notre Gouvernement et en
divisant le pouvoir souverain par une répartition entre trois
branches égales, les fondateurs de la Constitution ont
cherché à définir un système d'ensemble,
mais il n'était pas dans leur intention que les pouvoirs
séparés opèrent dans une indépendance
absolue".
Le résultat, c'est le régime présidentiel américain, régime par nature
instable, subissant des conflits, blocages fréquents - donnant
lieu notamment de différents scandales, du Watergates au MonicaGates -
car le Président ne peut dissoudre le Congrès tandis que les
Congressmen ne peuvent révoquer les Secrétaires d'État.
Les
adaptations ou innovations américaines :
Il faut noter que la transposition des institutions anglaises ne s'est pas faite
sans adaptations pour tenir compte d'un cadre nouveau : un cadre républicain,
démocratique et fédéral. Quelles sont ces adaptations ?
- cadre républicain : rejet du principe monarchique du Roi
héréditaire ; on lui substitue le principe
républicain du Président élu au niveau
fédéral. Au niveau des Etats
fédérés, l'article 4, section 4 prévoit que
"Les Etats-Unis garantiront à chaque Etat de cette Union une
forme républicaine de gouvernement". On instaure cependant un
vice-président habilité à remplacer le
président de la même façon que le prince de Galles
doit succéder au Monarque régnant.
- cadre démocratique : le Peuple devient souverain alors qu'en Angleterre
la souveraineté est de droit divin. Pour autant, en tant que le peuple
exerce lui-même le pouvoir souverain, on essaye de limiter ses excès.
Cela explique la méfiance des constituants mais aussi des gouvernants
américains vis-à-vis du suffrage universel pendant très
longtemps. Par exemple :
---- le Président américain n'est toujours pas aujourd'hui élu
au suffrage universel direct. Il faudra attendre 1913 pour voir le Sénat
élu au suffrage universel. Seule la Chambre des Représentants
est élue au suffrage universel dès 1787.
---- le droit de vote lui-même sera limité jusqu'au XXe siècle
en fonction de critères d'impôt, de propriété et
de résidence ; ce qui conduira indirectement à l'exclusion notamment
des petits fermiers, des noirs, des femmes...
- cadre fédéral : la Séparation des Pouvoirs est entendue
au sens large. Elle est classiquement horizontale répartissant les compétences
entre trois "branches" comme en Angleterre : l'Ex, le Lég et le Jud.
Mais elle est aussi verticale délimitant trois niveaux de pouvoirs :
l'État fédéral, les États fédérés
et les collectivités locales. Le fédéralisme peut être
considéré aussi comme un moyen de diviser le pouvoir. En fait,
la séparation des pouvoirs est conçue avant tout comme une garantie
de l'autonomie des Etats fédérés, de la démocratie
locale. Il s'agit beaucoup moins de garantir le Parlement des atteintes venant
de l'Exécutif. C'est là l'innovation la plus grande de la Constitution
de 1787, " la plus grande découverte politique des temps moderne " dira
Tocqueville.
Pourquoi
les États-Unis n'ont pas connu l'évolution vers le parlementarisme
moderne ?
Deux raisons au moins l'expliquent :
- l'Exécutif n'étant pas royal mais républicain et élu,
il n'y avait pas de raison pour que le Congrès remette en cause son statut
et ses compétences
- les constituants à cause de la forme de leur État (= fédérale)
ont craint les conflits entre État fédéral et États
fédérés ; ils ont donc fait en sorte que la Constitution
fédérale qui prévoit la répartition de leurs compétences
respectives soit rigide, protégée par une Cour Suprême qui
se donnera bientôt la compétence de contrôler la constitutionnalité des lois.
Du coup, la Constitution américaine a très peu
évolué comme le régime qu'elle organisait. Elle a
maintenu tel quel le mode de séparation des pouvoirs (avec il
est vrai le développement d'une collaboration de fait entre les
trois branches).
Le fonctionnement du régime est fondé sur une règle de gouvernement très simple inspirée des idées de Montesquieu sur la Balance des Pouvoirs ; c'est la règle des "Checks and Balances" (poids et contre poids). Exécutif, Législatif mais aussi Judiciaire même s'ils sont assez isolés sur un plan fonctionnel peuvent agir les uns les autres pour se contraindre et finalement mieux travailler ensemble : le conflit est institutionnalisé mais il dégénère souvent en raison de l'absence de possibilités de révocation réciproque de l'Exécutif et du Législatif.
l'Exécutif :
Site web de la Maison blanche : la Présidence
L'Exécutif aux États-Unis (comme dans tous les pays qui
ont adopté un moment à un autre le régime
présidentiel : par exemple la France en 1791et en 1848) est
monocéphale. Le Président américain est à
lui tout seul Chef de l'État et Chef de Gouvernement. Il
n'existe pas de Gouvernement américain proprement dit. Cela au
sens où il n'existe pas à côté du
Président un organisme doté de la personnalité
juridique, exerçant des compétences collectives. Le
Président est simplement entouré de collaborateurs qu'il
nomme et révoque à volonté.
- désignation
du Président
Le processus est d'une grande complexité teintée
d'archaïsme. Les gouvernants doutant que la masse des citoyens fut
en mesure de faire "un choix intelligible", ont opté pour un
système indirect à deux étapes à la fois
pour la désignation des candidats à
l'élection et celle du président lui-même.
la désignation des candidats à l'élection
Précédant
l'élection, existe une pré-étape essentielle non prévue
par les constituants. C'est la phase de sélection du candidat par chaque
grand parti (le parti démocrate symbolisé par l'âne, le
parti républicain par un éléphant).
1) Entre février et juin, les deux grands partis dans chaque
État organisent des élections permettant à leurs
militants ou à leurs électeurs de désigner des
délégués représentant un candidat .
Au début seule existait la formule du caucus,
c'est-à-dire la désignation des
délégués par des militants ou l'appareil du Parti.
La formule des primaires inaugurée pour la première fois
en 1905 dans le Wisconsin s'est progressivement
développée au point de supplanter les caucus. Cette
formule plus démocratique permet aux électeurs de choisir
eux-mêmes les délégués. De telle primaires
ont eu lieu lors des dernières élections dans 35 des 50
États américains et dans le district de Columbia
où se trouve Washington. Ces primaires ont été
fermées dans 17 États : le vote est alors
réservé aux électeurs ayant déclaré
leur affiliation au parti concerné lors de leur inscription sur
les listes électorales. Pour les primaires ouvertes
organisées dans 19 États, aucune déclaration
d'allégeance n'est exigée. En conséquence, un
électeur démocrate peut aussi participer à la
désignation des délégués
républicains et inversement. Dans certains États comme le
New Hampshire, les électeurs peuvent voter pour une
personnalité qui n'est pas candidate.
2) En été, ces délégués (4284 pour les démocrates,
2206 pour les Républicains) se réunissent en un Congrès
national appelé Convention afin de désigner le candidat officiel
de leur Parti. Ces grands happenings sont traditionnellement organisés
en juillet pour le parti dans l'opposition, en août pour celui du Président
sortant.
Pour recevoir l'investiture de son parti, un candidat doit obtenir la
majorité absolue des suffrages des
délégués. Les délégués sont
tenus de respecter le mandat de leurs électeurs au premier tour
seulement ; ce qui autorise ensuite toutes les tractations. Une fois
désigné, le candidat à la présidence
choisit pour former un ticket, un candidat à la
vice-présidence susceptible de lui apporter les voix
d'électeurs qui ne lui étaient pas favorables au
départ.
Nota : depuis quelques années se présentent aux élections des candidats dits indépendants qui n'appartiennent pas aux deux grands partis. Ils n'ont donc pas été désignés selon la procédure habituelle (cf. Ralph Nader aux dernières élections)
Nota 2 : le rôle des medias et notamment d'Internet dans le choix des candidats est devenu essentiel. Certains candidats comme Howard Dean pour les élections 2004 ont émergé grâce à Internet. Cf. Petit article sur le Journal du Net avec les sites des différents candidats.
- l'élection présidentielle
C'est une élection
au SU indirect. On ne décompte pas les voix des électeurs au niveau
national comme cela se fait en France. On décompte les voix des grands
électeurs qui ont été élus par chaque Etat, fédéralisme
oblige. Les deux étapes sont les suivantes :
--- l'élection des grands électeurs
Cette élection a lieu en novembre au scrutin de liste
majoritaire à un seul tour à la pluralité de voix
dans chaque Etat. Le nombre de grands électeurs par Etat est
égal à celui des parlementaires (sénateurs +
représentants) élus dans chaque Etat. Les
électeurs se prononcent pour la liste des grands
électeurs se réclamant du candidat présidentiel de
leur choix. Mais par le jeu du scrutin majoritaire, si la liste d'un
candidat l'emporte, ne serait-ce que d'une dizaine de voix, celui-ci
obtient tous les votes des grands électeurs de cet État.
Comme les candidats aux fonctions de grands électeurs se sont
engagés à choisir X ou Y, on sait normalement qui sera
Président dès la fin de la 1è étape. Il
suffit de compter le nombre de Grands électeurs pour chaque
candidat . Celui qui a la majorité absolue est le
Président virtuel.
Nota : lors des dernières élections, le président virtuel
n'a pu être déterminé au soir de la première étape
car les deux candidats ne pouvaient atteindre la majorité sans les voix
litigieuses de la Floride.
--- l'élection
du président
En décembre, les grands électeurs élisent le Président
et le vice-président qui doivent avoir la majorité absolue (270)
pour être élus. En cas d'absence de majorité, la Chambre
des Représentants départage les 3 candidats arrivés en
tête et le Sénat fait de même pour le vice-président.
Tel fut le cas pour Thomas Jefferson en 1800 et John Quincy Adams en 1824. Il
faut noter qu'il n'y a pas de proportion rigoureuse entre la population réelle
des Etats-Unis et le nombre des grands électeurs. Cela a abouti deux
fois à l'élection d'un Président majoritaire chez les grands
électeurs, minoritaire dans la population (Hayes en 1876, Harrison en
1888).
Nota : un Président
n'est rééligible qu'une fois. Cet usage n'est devenu une règle
constitutionnelle qu'après l'adoption du 22ème amendement en 1951.
Avant cela dans des conditions très spéciales, F. Delano Roosevelt
a été réélu 4 fois entre 1932 et 1945.
compétences
du Président
Le président américain est l'équivalent du
monarque anglais de 1750 qui régnait et gouvernait. Ce qui
signifie qu'il détient à la fois les compétences
d'un chef d'État (soit les compétences traditionnelles
que sont le droit de représenter les Etats-Unis à
l'étranger, le droit de promulguer les lois, le droit de
message...), et celles d'un Premier ministre à l'ancienne (ayant
la compétence globale d'exécution des lois...).
Précisons cette dernière compétence.
Tout le pouvoir du Président est tiré juridiquement du fait qu'il
a le quasi monopole de la fonction exécutive ; fonction entendue :
- au sens strict dans les circonstances normales. Le
Président doit se contenter d'appliquer la loi (ou statute)
proposée et votée par le seul Congrès. S'il
n'applique pas ou ne respecte pas la loi, il encourt le risque de voir
la chambre des Représentants mettre en jeu sa
responsabilité pénale (cas de l'impeachment). Il sera
alors jugé par le Sénat. Par deux fois, dans la
période récente, un président a failli subir cette
procédure : 1974 Nixon à l'occasion du Watergate et 1988
Reagan à l'occasion de l'Irangate.
- au sens large dans les circonstances exceptionnelles. Le président
peut alors user de :
- pouvoirs d'urgence (Emergency Powers): le Président demande au Congrès
de prendre les mesures nécessaires pour faire face à une situation
de crise ; mesures qui vont au-delà de la simple exécution des
lois. [Application importante de ces pouvoirs à partir de Roosevelt]
- pouvoirs délégués (Statutory Powers) : le Président
demande au Congrès de légiférer à sa place. Le Congrès
s'il est d'accord et avec le contrôle de la Cour Suprême donnera
une habilitation expresse au Président.
Le fondement du pouvoir présidentiel (Executive power) fait que le Président est dans une situation moins favorable que celle d'un Premier ministre dans un régime parlementaire moderne. Ce dernier est à l'origine des lois (il a l'initiative des lois en droit et en fait), détient un pouvoir réglementaire autonome, a une majorité parlementaire pour le soutenir ... Le président lui n'est pas source de droit (sauf à travers ses proclamations et ses executive orders) et reste subordonné à un Congrès dont la majorité lui est souvent hostile.
NOTA : le Président dans l'exercice de son pouvoir gouvernemental bénéficie de ce qu'on appelle le "Privilège de l'Exécutif" qui a été précisé non par la Constitution mais par la Cour Suprême. Il a le droit de ne pas révéler, dans l'intérêt général, le contenu de documents confidentiels se rapportant à des secrets diplomatiques ou militaires (donc ayant trait à la sécurité nationale). Dans une décision Etats-Unis c. Nixon de 1974, la Cour a rappelé que le Président n'avait pas un privilège "absolu". A l'opposé de ce que prétendait Nixon, le Président ne peut faire échec au pouvoir des tribunaux notamment en considérant comme confidentielles les conversations enregistrées dans son bureau ovale qui n'avaient pas un caractère militaire ou diplomatique.
Cinstruments
de l'action présidentielle :
Le Président bénéficie à la fois de moyens de pressions
juridiques vis-à-vis du Congrès et de la Cour Suprême et
du concours d'organes gouvernementaux. Sa situation n'en est pourtant guère
renforcée. Il lui manque par rapport à un Premier ministre moderne
le droit de dissolution et le concours d'un véritable cabinet solidaire
avec ses compétences collectives.
moyens de
pression juridiques :
1 par rapport au Congrès
------- le droit de veto
Il faut distinguer entre :
- le veto express : le Président dispose de 10 jours pour promulguer
la loi (le bill) votée par le Congrès. Selon la section VII de
la Constitution, il peut :
# ne rien faire : au-delà de 10 jours, le bill aura force de loi comme
s'il avait été revêtu des sa signature.
# présenter ses objections et refuser de voter le bill : pour devenir
une loi, le bill devra être revoté par chacune des deux chambres
du Congrès. Mais il faudra une majorité des 2/3 des membres pour
chaque chambre. On dira alors que le veto du président a été surmonté.
Quel usage ?
Dans un contexte de cohabitation, le recours
répété à cette prérogative a souvent
dégénéré en crise ouverte entre
Législatif et Exécutif. Record historique : Franklin
Delano Roosevelt usa de 635 vetos entre 1933 et 1945, soit en moyenne
53 vetos par an (36 par an pour le républicain Gérald
Ford et 31 pour le démocrate H. Truman). Cette stratégie
de l'affrontement n'est possible que lorsque le Président
dispose du soutien actif de l'opinion publique : par exemple, Ronald
Reagan (78 vetos en 8 ans) qui sut susciter et exploiter un tel
soutien. Mais le "Grand communicateur" avait une côte de
popularité que le Président Clinton n'a pas eu.
Réforme récente :
- le veto de poche : c'est un veto qui n'a pas été prévu
explicitement par la Constitution. Il intervient seulement en fin de session.
Lorsque le délai de 10 jours court en fin de session, le
Président peut décider de ne rien faire. Le bill ne
deviendra pas une loi car le délai n'est pas achevé. Il
faut alors que le Congrès revote le bill à une prochaine
session. En ne faisant rien, le Président a donc gardé
son veto officiel "dans la poche". Mais il a réussi à
empêcher, freiner le congrès qui a toujours du mal
à trouver une majorité en son sein pour voter une loi.
Nota : le Congrès
par une loi du 9 avril 1996 avait accordé un nouveau veto au président
: le Line Item veto. Ce veto avait trois particularités :
- il devait intervenir après que le bill soit devenu une loi (c'est-à-dire
après que le texte voté par les deux chambres soit entré en vigueur)
- il était partiel : il ne pouvait concerner qu'une partie de la loi
- il intervenait en matière financière (trois types de dispositions
: 1 any dollar amount of discretionary budget authority 2 any item of new direct
spending 3 any limited tax benefit)
Le président Clinton a eu recours a ce veto pour la première fois
le 11 août 1997. Mais la Cour Suprême a jugé en 1998 qu'il
était inconstitutionnel dans sa décision W.J.
ClINTON, PRESIDENT OF THE UNITED STATES, et al., APPELLANTS v. CITY OF NEW YORK
et al.
----------- L'impoundment
(ou Impoundments Powers) revendiqué d'abord par Nixon. Le Président
s'autorise à refuser de dépenser des fonds votés par le
Congrès ; fonds servant à financer tel ou tel projet voulu par
les congressmen. Une loi de 1974 est venue organiser et limiter ce pouvoir présidentiel
dont la constitutionnalité est douteuse.
- si le Président veut simplement différer une dépense,
les Chambres peuvent s'y opposer en votant une résolution concordante.
- si le Président veut supprimer une dépense, la proposition du
Président ne prend effet que si dans les 45 jours le Congrès a
voté une loi acceptant cette suppression ou la diminuant.
Nota : la Cour Suprême ne s'est pas prononcée explicitement sur la constitutionnalité de ce pouvoir. Seulement dans une décision Train v. NY 420 US 35 à propos d'une loi, la Cour a estimé que le Congrès n'avait pu conférer au Président un pouvoir discrétionnaire de rétention budgétaire.
2 par rapport à la Cour Suprême
Le Président n'a là encore qu'un seul véritable moyen d'action
; c'est la nomination des juges. Le président nomme effectivement les
9 juges de la Cour (dont le Chief Justice). Nomination qui doit être entérinée
par une majorité de Sénateurs. Le Président en nommant
les juges dont la philosophie politique présente des analogies avec la
ligne gouvernementale peut espérer orienter la jurisprudence de la Cour.
Espérer seulement car une fois désignés, les juges sont
indépendants (du fait qu'ils ont une fonction à vie - life tenure
- et une rémunération importante).
Nota : notons la différence entre la conception de la séparation des pouvoirs en France et les Etats-Unis ; aux Etats-Unis, le juge n'est pas indépendant car il est considéré comme un pouvoir politique comme les autres qui peut entraver l'action du Gouvernement. Voilà pourquoi on peut agir sur lui.
concours
d'organes gouvernementaux
Parmi tous les organes de Gouvernement qui constituent l'Administration, nous
distinguerons :
- le Cabinet
(qui n'a ni le statut, ni les compétences d'un Cabinet Parlementaire
à l'anglaise). C'est le Conseil des Secrétaires d'État
institué par Washington ; il ne se réunit presque jamais.
- le Bureau (1939)
C'est un ensemble disparate de conseils spécialisés composés
de hauts fonctionnaires et conseillers politiques. Le plus connu est le National
Security Council qui coordonne les politiques étrangère, intérieure,
militaire. (On a parlé de lui lorsqu'il a été mis en cause
pendant l'Iran-Gate pour avoir autorisé des ventes d'armes illégales
à l'Iran).
- le White House Office
C'est l'état-major personnel du Président. Il est
composé de personnalités politiques sans mandat.
NOTA : le rôle croissant du Bureau et du White House Office
conduit à un phénomène grave : le Gouvernement
américain se trouve court-circuité. (cf. l'Irangate).
le Congrès
Site web du
Congrès et de sa bibliothèque juridique :
---La Chambre des représentants
---Le Sénat
Le Congrès est un Parlement bicaméral composé d'une Chambre
des Représentants (435 membres élus pour 2 ans) et du Sénat
(une centaine de membres élus pour 6 ans). Il a l'avantage de pouvoir
maîtriser :
- le processus de création de la loi
- le processus de contrôle de l'exécutif
Cela fait de lui juridiquement et politiquement l'organe le plus fort du régime
politique américain.
le processus
de création de la loi
Le Congrès peut en toute liberté proposer et voter la loi (sauf
veto du Président). Il décide de la procédure législative.
Cette indépendance est liée à des facteurs :
a) juridiques
Le Congrès, particulièrement le Sénat dispose de nombreuses
armes juridiques dont l'utilisation peut lui conférer en pratique un
véritable pouvoir d'obstruction dans les débats en commission
ou en séance plénière.
- l'arme des amendements : de nombreux amendements sans rapport avec le texte
(les rider) peuvent finir par orner des lois devenues des " Christmas trees
".
- le filibustering : un petit groupe de sénateurs causent à mort
(talk to death) à la tribune pour bloquer la procédure. Le Sénat
peut cependant appliquer la règle 22 pour leur retirer la parole.
- le renvoi en commission (recommittal)
- la remise à plus tard de la décision (tabling)
- la suppression de la clause d'application (" be it enacted ") : la loi
devient un souhait sans portée.
b) politiques
Cette indépendance est renforcée par des causes politiques ; les
partis politiques étant indisciplinés, non homogènes, ils
n'obéissent pas à des consignes de vote. Aucune discipline majoritaire
ne lie en conséquence le Congrès. Les majorités ne sont
jamais automatiques ; elles se font et se défont ponctuellement selon
les sujets. Cette absence de discipline de vote est un handicap pour le président
qui doit compter sur une majorité hypothétique pour faire adopter
ses lois déposées par un congressman ami. En période de
cohabitation, cela peut être aussi un atout pour le Président,
lui permettant de débaucher les voix de parlementaires républicains
modérés. L'essentiel des lois votées sous Clinton l'ont
été grâce à l'appui des républicains lorsque
les défections démocrates étaient trop nombreuses. Avant
Clinton, MM. Reagan et Bush avaient courtisé avec succès les démocrates
conservateurs du sud des Etats-Unis.
le processus
de contrôle de l'Exécutif
Il se déroule à l'occasion de l'exercice du pouvoir d'autorisation,
de surveillance, de veto et d'impeachment du Congrès.
a) pouvoir d'autorisation :
- nominations : le Sénat par exemple approuve à la
majorité simple toutes les nominations importantes aux fonctions
publiques fédérales (et à la Cour Suprême).
- traités
: il approuve à la majorité des 2/3 les traités normaux.
Il peut aussi approuver certains traités en forme simplifiée (les
Executive Agreements) qui n'exigent pas de ratification. Il s'agit ici d'une
pratique qui a été admise par la Cour Suprême in USA v.
Belmont, 1937.
Face au développement des traités en forme
simplifiée, le Sénat a essayé de réagir en
1954 (amendement Bricker émanant du Sénat : tout accord
international devait être soumis à l'autorisation des deux
chambres aux fins de ratification. Échec faute de voix), 1972
(Case Zablocki Act oblige le président à communiquer pour
information au Congrès l'ensemble des executive agreements
conclu), en 1979 (loi du 8 juin :le Sénat décide que son
approbation serait nécessaire pour autoriser à rompre
tout accord de défense mutuelle entre les Etats-Unis et un pays
tiers).
- actes de
guerre : le Congrès a tenté d'accroître son influence dans
le domaine des affaires étrangères à la suite de la Guerre
du Vietnam : il a voté ainsi en 1973 une résolution sur les pouvoirs
militaires du Président. Cette résolution prévoit notamment
à propos de l'envoi de troupes sur des théâtres d'opérations
extérieures :
- en l'absence de Déclaration de guerre, l'envoi de forces armées
américaines doit faire l'objet d'une justification écrite présidentielle
envoyée au Speaker de la Chambre des Représentants et au Président
du Sénat.
- dans un délai de 60 jours après la transmission de ce rapport,
l'utilisation des forces armées doit cesser à moins que :
1le Congrès ait voté une déclaration de guerre ou ait autorisé l'intervention militaire
2 il a accordé au Président un nouveau délai de 30 jours
seulement.
3 le Congrès est dans l'impossibilité de se réunir en raison
d'une attaque armée contre les États-Unis.
b) pouvoir de surveillance :
Principalement grâce à ses commissions permanentes qui siègent sans interruption, sont ouvertes au public et peuvent se faire communiquer tout document (sauf Privilège de l'exécutif), le Congrès est en mesure non seulement de surveiller mais aussi de paralyser le Président.
c) pouvoir
de veto
= le veto législatif : il consiste pour le Congrès
à annuler des mesures présidentielles prises en vertu
d'une délégation législative. Par exemple, le
Congrès s'autorise à pratiquer des coupes dans un budget
dont il avait confié au Président le pouvoir de
l'élaborer.
Ce veto législatif a été interdit par l'arrêt Chadha
du 23-6-1983 (puis le 7-7-1986). La Cour Suprême annule une disposition
de la loi Gramm-Rudman permettant à un contrôleur général
nommé par le président mais révocable par le Congrès
de pratiquer des coupes automatiques pour réduire le déficit budgétaire,
comme contraires à la séparation des pouvoirs.
d) pouvoir d'impeachment
Cette procédure complexe, longue, presque archaïque permet au Congrès
de destituer le Président (mais aussi le vice-président et les
fonctionnaires civils) non pas sur des motifs politiques mais pour des raisons
de violation grave ou abus du droit. On parle en conséquence de responsabilité pénale.
- Motifs de destitution : " trahison, concussion, crime contre la chose publique
ou délit grave "
- Procédure : la Chambre des Représentants prend l'initiative.
Il suffit que l'un de ses membres dépose une proposition d'impeachment
qui est transmise à la Commission des Affaires Judiciaires. Cette commission
vote une résolution indiquant s'il y a lieu d'engager une enquête
d'impeachment et dans le cas favorable commence des auditions. Elle se prononcera
finalement sur une résolution d'impeachment. Si cette commission émet
un avis favorable, alors l'assemblée à la majorité simple
vote sur la mise en accusation et saisit le Sénat.
Le Sénat se transforme alors en Haute Cour de Justice. Elle se prononce
sur le dossier qui lui a été transmis, après avoir entendu
l'accusation, la défense et les témoins. Si la condamnation est
votée à la majorité des 2/3, alors le président
est démis de sa charge.
- Application : cette procédure tombée en désuétude
est revenue à la mode après que le Président Nixon ait
démissionné en 1974, suite à l'adoption par la Commission
des Affaires judiciaires d'une résolution d'impeachment (Affaire du Watergate).
En 1986, la procédure a été tout près d'être
déclenchée contre le président Reagan (Affaire de l'Irangate).
Enfin depuis sous la présidence de Clinton, le Monicagatesa permis d'enclencher
la procédure qui n'est pas allée à son terme.
Tout le problème est de savoir ce qu'il faut entendre par délit
" impeachable ".
La Cour Suprême comme son nom l'indique se situe au sommet de la hiérarchie
des tribunaux aux Etats-Unis.
Que ce soit les tribunaux de la fédération qui sont :
- en 1e instance les cours de district
- en 2e instance les cours d'appel
Que ce soit les tribunaux des États qui sont coiffés par les Cours
Suprêmes des États.
La Cour Suprême est aussi une Cour constitutionnelle. Certes tous les
tribunaux ont pour mission de contrôler la constitutionnalité des
actes pris par les pouvoirs législatifs, exécutif, (locaux ou
fédéraux). Mais la Cour Suprême a le dernier mot en la matière
: elle peut casser ou réformer les décisions des tribunaux de
la fédération que la Constitution qualifie dans l'art. 3 Section
I de "cours inférieures". Elle intervient en dernier ressort lorsque
les tribunaux des États se sont prononcés sur un problème
de conformité à la Constitution fédérale.
A composition
(voir plus haut) + article sur
les rapports entre l'élection US et la composition de la CS.
B dispositions
constitutionnelles appliquées
Toute la Constitution est obligatoire et s'impose notamment aux lois ordinaires
fédérales ou simplement étatiques. Cependant certaines
dispositions de la Constitution sont plus souvent évoquées que
d'autres. Elles ont donné lieu en conséquence à un contentieux
particulièrement abondant.
- la clause dite du "Due Process of Law" qui figure dans le 5e amendement pour
ce qui concerne la Fédération et dans le 14e amendement
pour ce qui concerne les Etats. Elle a pour contenu : "Nul ne peut être
privé de sa vie, de sa liberté ou de ses biens sans une procédure
régulière [juste]". Cela entraîne une protection pour chaque
citoyen ; protection qui a été étendue à tous les
cas où une personne fait l'objet d'une décision défavorable
à ses intérêts (révocation d'un fonctionnaire, expulsion
d'un étudiant). Cette clause peut être invoquée contre toute
loi mais aussi une décision administrative ou judiciaire.
- la clause d'égalité : "Aucun Etat ne peut refuser à quiconque
relève de sa juridiction une égale protection des lois". On la
trouve dans le 14e amendement. Elle a été adoptée après
la Guerre de Sécession dans le but d'empêcher les Etats du Sud
de rétablir l'esclavage par des moyens détournés. Elle
est utilisée aujourd'hui pour faire barrage à toute tentative
de discrimination négative fondée sur des motifs religieux, raciaux,
politiques.
- le principe du respect des droits individuels (1er et 14e amendement).
C politique
jurisprudentielle de la Cour
La Cour Suprême n'hésite pas à jouer un rôle politique,
à prendre position indirectement dans des débats idéologiques,
politiques lorsqu'elle contrôle la constitutionnalité des actes
de l'Exécutif et du Législatif. L'indépendance des juges
le lui permet. On peut donc parler d'une "politique jurisprudentielle" ; ce
qui n'implique pas forcément une politisation des juges. En effet, la
Cour Suprême cherche avant tout à interpréter et adapter
la Constitution en tenant compte de l'opinion générale.
1e période : jusqu'en 1880
La Cour n'use qu'avec modération de son pouvoir d'interprétation
et d'annulation [Judicial Restraint]. Très peu de lois et d'actes présidentiels
sont déclarés inconstitutionnels.
La Cour Suprême veille surtout à éviter l'éclatement
de la fédération :
- elle interprète extensivement les dispositions
constitutionnelles qui définissent les compétences
dévolues au Congrès et au Président. En 1819, elle
déclare que la Constitution malgré l'absence de toute
disposition expresse autorise le pouvoir fédéral à
créer une banque nationale (1e application de la théorie
dite des "pouvoirs implicites")
- elle refuse de mettre en cause les mœurs et les traditions de certains Etats
(Cf. L'esclavage décision D. Scott v. Sandford 1857 où la Cour
Suprême refuse la citoyenneté politique aux noirs, le droit d'ester
en justice).
2e période
: de 1880 à 1937
La Cour Suprême prend position contre les tendances interventionnistes
du pouvoir fédéral pour faire face à la crise économique.
Elle estime que les lois fédérales interventionniste (ex-: lois
anti-trust) sont inconstitutionnelles parce qu'elles pénètrent
dans le domaine réservé aux Etats fédérés.
On a parlé à ce moment de "Gouvernement des juges". La
Cour Suprême sous couvert d'interpréter la Constitution
bloque les initiatives des autorités élues au suffrage
universel, ne tient pas compte de l'opinion générale. La
Cour Suprême est entrée en conflit avec le
Président F.D. Roosevelt qui avait été élu
sur un programme interventionniste, le New Deal. Le conflit ne fut
tranché par le peuple qu'en 1936 lorsqu'il réélut
Roosevelt. Celui-ci présenta au Congrès un projet de loi
lui permettant de désigner des juges supplémentaires et
donc de modifier la majorité au sens de la Cour Suprême.
Le projet fut rejeté mais la Cour Suprême s'inclina.
3e période
: de 1937 aux années 1980
La Cour Suprême maintient une attitude engagée [Judicial Activism]
mais oriente différemment sa jurisprudence. Elle admet l'interventionnisme
économique ; en procédant à des constructions juridiques
audacieuses, elle contraint les Etats à pratiquer un interventionnisme
social.
Exemple : elle les oblige à assurer par des mesures positives l'égalité réelle des citoyens.
- décision Brown 1954 de la Cour Waren par laquelle la Cour Suprême
oblige les Etats à pratiquer l'intégration scolaire. Les enfants
blancs et noirs ne peuvent être éduqués dans des établissement
séparés ; ce qui renforcerait l'inégalité de fait
entre eux. D'où les bus jaunes qui ont sillonné les Etats-Unis
pour permettre aux enfants noirs d'intégrer les écoles blanches
vice-versa.
- décision Gray & Sanders (1963)
- décision Regents of the University of California (1978) : la Cour Suprême
admet la constitutionnalité d'une politique de discrimination raciale
"positive" en faveur des minorités. [Affirmative action] Cela justifie
en pratique l'existence de quotas (non rigides) pour l'embauche des employés,
à l'entrée des étudiants à l'université (16
% de places réservées aux étudiants noirs, latinos même
s'ils ont une note inférieure aux blancs).
4e période : les années 90
La Cour qui a vu sa composition changer - le Président Reagan ayant pu
nommer de nombreux juges - prétend pratiquer une politique jurisprudentielle
plus réservée et plus "conservatrice ".
Elle a permis que la peine de mort soit rétablie par les Etats fédérés.
Elle semble réservée sur la politique de discrimination positive
(ou Affirmative Action). La Cour en juin 2003 a rendu une
décision de principe très attendue sur ce système (Université du Michigan).
La décision maintient le système mais à condition
notamment d'agir au cas par cas en respectant l'objectif de
diversité. La Cour avait déjà failli rendre une
décision de principe mais les parties s'étaient entendues
pour que le procès n'ait pas lieu (nov. 97). Enfin, en juin
2007, la
Cour suprême américaine est revenue sur sa jurisprudence
Brown vs. Board of Education ; elle considère qu'une
classification raciale utilisée dans le cadre d'une politique
éducative visant à promouvoir une diversité
d'origine dans une école, est une "approche extrême". Si
la possibilité d'utiliser ce type de classification n'est pas
déclarée explicitement inconstitutionnelle, il reste que
l'Affirmative Action sera maintenant très difficile à
mettre en œuvre aux Etats-Unis. Cette décision,
conformément à l'universalisme des droits de l'homme,
fait apparaître le caractère malsain de toute politique
raciale. Reste évidemment à préserver par des
moyens "républicains" une diversité d'origine dans les
écoles et les entreprises.
Extraits de la décision : “Classifying and assigning schoolchildren according to a binary conception of race is an extreme approach in light of this court’s precedents and the nation’s history of using race in public schools, and requires more than such an amorphous end to justify it.” Articles du NYT.
CONCLUSION :
le régime
américain appliqué aux États-Unis menace s'il respecte
ses propres règles de fonctionnement d'évoluer inévitablement
vers un régime d'Assemblée (ou régime congressionnel selon
la théorie du Président Wilson).
Note historique :La présidence CLINTON et la cohabitation à l'américaine
Le
Président Clinton a dû faire face à un
Congrès dont la majorité est restée
républicaine dans ses deux chambres.
C'est un cas de figure très courant dans l'histoire américaine,
soit une cohabitation entre un Congrès dominé par l'un des deux
grands partis et un Président appartenant à l'autre formation.
Cette situation comporte un risque de sérieux blocages mais n'a jamais
jusqu'à présent conduit à une paralysie de l'action gouvernementale.
Les acteurs en présence doivent accepter le compromis plutôt que
l'affrontement ; cela est inévitable du fait que le président
ne peut dissoudre le Congrès et que celui-ci ne peut renverser le Président
et son Gouvernement sauf en cas de "trahison, concussion ou délit grave"
qui justifie alors une procédure d'impeachment. Ce compromis est d'ailleurs
nécessaire même lorsque le Président et le Congrès
sont de la même couleur politique. Ainsi, l'existence de majorités
démocrates au sein de chacune des chambres issues des élections
de 1992 n'a pas dispensé M. Clinton de laborieuses tractations avec les
Congressmen démocrates. Cela est dû au fait qu'il n'existe
pas de discipline de vote au Congrès : les majorités ne sont jamais
automatiques ; elles se font et se défont ponctuellement selon les sujets.
Cette absence de discipline de vote peut être aussi un atout pour le Président,
lui permettant de débaucher les voix de parlementaires du camp opposé.
L'essentiel des lois votées ces deux dernières années l'ont
été grâce à l'appui de voix issues des deux partis.
Avant M. Clinton, MM. Reagan et Bush avaient courtisé avec succès
les démocrates conservateurs du sud des Etats-Unis.
En théorie, seul le Congrès aujourd'hui
républicain peut proposer des lois. En pratique, le
Président s'assure de la coopération d'un parlementaire
pour proposer un texte. Lors qu'un texte émane du Congrès
et que celui-ci l'a adopté, le président peut opposer son
veto (que le Congrès peut outrepasser en réunissant une
majorité des deux tiers dans chacune des 2 Chambres). Dans un
contexte de cohabitation, le recours répété
à cette prérogative a souvent
dégénéré en crise ouverte entre
Législatif et Exécutif. Record historique : Franklin
Delano Roosevelt usa de 635 vetos entre 1933 et 1945, soit en moyenne
53 vetos par an (36 par an pour le républicain Gérald
Ford et 31 pour le démocrate H. Truman). Cette stratégie
de l'affrontement n'est possible que lorsque le Président
dispose du soutien actif de l'opinion publique : par exemple, Ronald
Reagan (78 vetos en 8 ans) qui sut susciter et l'exploiter un tel
soutien.