Philosophie du droit /constitutionnel



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Vers une persécution !




L'accès véritable au droit constitutionnel suppose la maîtrise d'éléments de philosophie du droit.
Une approche descriptive, voire analytique des textes constitutionnels et de la jurisprudence des cours constitutionnelles ne saurait suffire. Les grands juristes constitutionnalistes français (tels Hauriou, Burdeau...) l'avaient admis. Leurs manuels comportaient tous une partie à portée philosophique. Ce n'est plus le cas ou presque pour les manuels contemporains, notamment en France.



Il n'existe pas aujourd'hui de philosophie constitutionnelle vivante. Aucun juriste dans la période contemporaine n'a pu ou voulu développer une doctrine du droit originale avec son compartiment constitutionnaliste. Certes, des thèses et des articles assez rares s'appuient sur des éléments philosophiques ; mais ces éléments se réfèrent inévitablement à des doctrines (positiviste, réaliste, décisionniste, etc.) anciennes, réinterprétées ou adaptées. Kelsen est sans doute en Europe un des derniers juristes qui nous a donné une ontologie juridique capable de refonder la théorie et la méthodologie du droit constitutionnel. S'interroger sur le déclin de la philosophie du droit constitutionnel supposerait sans doute que l'on réfléchisse plus largement sur le déclin de la métaphysique en Occident. Un déclin qui se manifeste par le triomphe d'une approche technicienne ou positiviste du droit : l'utilisation du terme de théorie au lieu de philosophie du droit en est un indice ; tout comme l'absence de formation philosophique des dits "théoriciens du droit" ou partisans d'une "théorie du droit" qui se contentent en conséquence des réfléchir sur les notions juridiques sans se référer à leur signification métaphysique et théologique.


Il est évident que la technicisation du droit et de l'Université participent de ce déclin. Ainsi, les universités n'enseignent plus que les différentes branches du droit appliquées à tel ou tel secteur de la vie économique ou sociale. Elles ne prennent plus en charge le droit en tant que droit ; ce qui supposerait le développement d'enseignements de philosophie du droit, d'épistémologie et de logique juridique ou encore de droit comparé, d'histoire des concepts juridiques (et non des institutions).

Relisons Heidegger dans sa conferénce "Qu'est-ce que la métaphysique ?" (1929) :
"Les domaines des sciences sont très éloignés les uns des autres. Leur façon de traiter leurs objets est radicalement différentes. Ces disciplines multiples et dispersées ne doivent aujourd'hui leur cohésion qu'à l'organisation technique des universités et des facultés et ne gardent leur signification que grâce à la finalité pratique des disciplines mêmes. Par contre, l'enracinement des sciences dans leur fondement essentiel est bien mort".



En conséquence, les œuvres de philosophie du droit du passé sont ignorées des étudiants mais aussi des enseignants. De même, l'interprétation juridique, la rhétorique juridique ne sont pas étudiés ou si peu. Pire, un consensus implicite existe maintenant au sein de la majorité des Universités pour bloquer un véritable retour à la philosophie du droit. Cela au nom de l'utile, des débouchés, etc. Il faut maintenant s'attendre à ce que des étudiants qui choisiraient des sujets de thèse de droit à portée métaphysique, des enseignants qui tenteraient de publier sur des questions de philosophie de droit subissent une exclusion plus ou moins masquée. Ils deviennent "illisibles" ou "inaudibles", voire confus pour un auditoire positiviste.