Les erreurs à ne pas faire
page écrite par O. CAMY
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Avec un peu d'insolence, on peut noter certaines "erreurs" dans nombre de manuels disponibles sur le marché :
- des erreurs conceptuelles - des oublis factuels
Quelques exemples :
1) erreurs conceptuelles :
ERREUR n°1 : théorie de la séparation des pouvoirs Beaucoup de manuels utilisent encore le concept classique de la théorie de la séparation des pouvoirs cher notamment à Carré de Malberg... Ils plaquent ce concept sur les révolutions française et américaine. Cela nous donne : - application stricte de la séparation des pouvoirs en 1787 (EU) et 1791 (France) avec des assouplissements en pratique. - application souple à partir de 1815 (France). C'est faux historiquement comme l'a montré magistralement M. Troper dans sa thèse. En réalité les constituants révolutionnaires ignoraient ce concept qui est apparu tardivement en France au XIXème siècle. Ils ont appliqué à la place les notions suivantes : - balance des pouvoirs (notamment en 1791 France, en 1787 EU) : distribution des pouvoirs entre trois branches. Le pouvoir législatif est redistribué entre le parlement et le chef de l'Exécutif. Interactions entre les organes (ex : le veto). Pas de spécialisation, ni d'indépendance. Origine Montesquieu. - spécialisation des pouvoirs (en 1793, 1848 France) : distribution des pouvoirs entre trois branches. Spécialisation et indépendance qui n'excluent pas une subordination envers le parlement. Origine Rousseau.
La notion de balance des pouvoirs sera adaptée et approfondie en Europe. On acceptera que les organes se révoquent : naissance du parlementarisme (dès 1782 an GB avec la démission collective du Cabinet dirigé par Lord North, à partir de la Restauration en France). La notion de spécialisation sera abandonnée sauf dans les Etats communistes (avec une trahison bien connue : le monopole du Parti communiste qui aboutit à une confusion des pouvoirs).
ERREUR n°2 : théorie de la souveraineté. Encore une erreur due sans doute à Carré de Malberg. Certains manuels plaquent sur la révolution française et ses inspirateurs la distinction moderne entre souveraineté nationale et populaire. Cette distinction n'était pas faite encore ! Par exemple Rousseau comme Sieyès peuvent être dits partisans aussi bien des deux souverainetés. (Relisez le vieux manuel de droit constitutionnel d'Hauriou !) Surtout on prétend tirer des conséquences absurdes de l'adhésion à ces deux théories... - On fait de Montesquieu un partisan de la Souveraineté nationale ; ce qui justifierait son adhésion à la représentation. Or Montesquieu justifie la représentation sans jamais recourir à la notion de Souveraineté nationale (qui sera formalisée seulement au 19ème siècle).
- On fait de Rousseau un partisan de la Souveraineté populaire ; ce qui justifierait son adhèsion à un régime de démocratie directe. Or Rousseau n'a jamais été partisan d'une Souveraineté populaire (c'est-à-dire d'une souveraineté simplement concrète, dont chaque citoyen aurait un fragment). Il justifie la démocratie directe sur l'idée abstraite de volonté générale qui ne saurait être représentée sauf à être aliénée ; ce qui n'exclut pas le passage à une démocratie indirecte (avec mandat impératif).
2)oublis factuels :
Le droit comparé est peu étudié d'où de très nombreux oublis :
Exemple n°1 à propos des USA : - qui vous a parlé du Line Item veto ? Le Congrès par une loi du 9 avril 1996 avait accordé un nouveau veto au président. Ce veto avait trois particularités : -- il devait intervenir alors que le bill est devenu une loi (c'est-à-dire alors que le texte voté par les deux chambres est entré en vigueur) -- il était partiel : il ne pouvait concerner qu'une partie de la loi -- il intervenait en matière financière : (trois types de dispositions : 1) "any dollar amount of discretionary budget authority 2) any item of new dircet spending 3) any limited tax benefit)
Ce président Clinton a eu recours à ce veto pour la première fois le 11 août 1997. Mais la Cour Suprême a jugé qu'il était inconstitutionnel dans sa décision du 25 juin 1998 : W.J. CLINTON, PRESIDENT OF THE UNITED STATES, et al., APPELLANTS v. CITY OF NEW YORK et al.
Exemple n°2 à propos de la Suisse : - qui vous a parlé de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 ? Et de ses innovations comme par exemple :
l'approbation des traités des cantons avec les Etats étrangers: l'art. 56 cst. rév ne prévoit plus pour la Confédération, comme c'est encore le cas aux art. 85,ch. 5, et 102, ch. 7, cst., un devoir général d'approbation. A l'avenir, avant la conclusion du traité, les cantons devront informer le Conseil fédéral. Si le traité porte atteinte au droit ou aux intérêts de la Confédération ou des autres cantons, le Conseil fédéral peut élever une réclamation devant l'Assemblée fédérale (art. 186, al. 3, cst. rév.). Celle-ci décide de l'approbation (art. 172, al. 3, cst. rév.).