COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL GÉNÉRAL
Cours
écrit par O. CAMY
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itre
I. Présentation critique du droit constitutionnel occidental classique
La coopération interétatique
La coopération internationale entre les Etats se traduit par la mise en place dorganismes destinés à gérer certains domaines daction communs. Le statut de ces organismes résulte dun traité et le droit produit par ces organismes est distinct du droit interne des Etats. En conséquences, les souverainetés nationales sont préservées et aucun Etat nouveau nest créé au-dessus des Etats. On parle alors de confédérations dEtats. Cependant, comme dans le cas de lUnion européenne, la coopération interétatique est si poussée dans certains domaines (économiques, monétaires) quon aboutit à un système mixte en partie fédéral et confédéral.
1.
La confédération
2.
Le cas de l'Union européenne
1.
La confédération
La confédération se présente comme l'association d'États
unitaires ou fédérés qui acceptent de gérer ensemble
certaines compétences grâce à des organes communs. Ils forment
une alliance dans un but de coopération dans des domaines plus ou moins
fondamentaux (économie, militaire...). En aucun cas, le ou les organes
communs ne constituent un autre État ni du point de vue interne (pour
les individus membres des États confédérés), ni
point de vue externe (pour les autres États sur la scène internationale).
1) origine
Les confédérations modernes sont apparues au 18ème et 19ème
siècles ; elles étaient fondées sur une identité
ou solidarité nationale qui ne pouvait s'exprimer par la création
d'un seul État (État unitaire/fédéral). Exemples
:
- la confédération des États-Unis de l'Amérique
du nord (1778-1787)
- la confédération germanique (1815/1886).
Ces confédérations, en tant que formes transitoires ont disparu
assez vite lorsqu'elles ont pu déboucher sur la création d'un
seul État. Ex : 1787 pour les États-Unis et 1871 Pour l'Allemagne.
Les confédérations modernes (celles du 20e siècle) sont
fondées plutôt sur une solidarité d'intérêts
(intérêts économiques, politiques...). Elles sont méconnues
car en trop grand nombre, créées à l'occasion de la conclusion
de nombreux traités internationaux. On peut citer parmi les plus célèbres
le Commonwealth, dernier vestige de l'Empire colonial anglais, l'OTAN, la CEE
(à laquelle a succédé lUE en 1992)), etc. Parmi les
plus récentes, la Sénégambie (1982) qui a disparu depuis,
la CEI qui s'est substituée à la fédération de l'URSS
et demain peut être l'alliance entre Bohème Moravie et Slovaquie,
le Canada et le Québec...
2) caractéristiques
1. le lien de droit qui unit ces États et précise les compétences
des organes communs confédéraux n'est pas une Constitution mais
un traité. Cela manifeste bien que les États ont conservé
leur pouvoir dÉtat et restent indépendants.
2. les organes communs sont composés de simples délégués
des États qui n'ont donc aucun pouvoir de décision propre ; ils
doivent constamment référer à leurs États respectifs.
Leur vote lors de la prise de décision se fait à l'unanimité.
Cela permet de ne pas passer outre l'avis d'un État qui détient
en conséquence un droit de veto.
3. les décisions prises par les organes communs ne sont pas applicables
directement sur les territoires des différends États confédérés.
Elles doivent faire l'objet d'une autorisation ou d'une ratification interne
sans lesquelles elles n'ont pas de valeur juridique dans l'ordre interne des
États.
4. les différents États peuvent sortir facilement de l'alliance
ou de l'association
Nota : le cas de la Suisse. La Suisse est bien une fédération
même si le terme de confédération est utilisé dans
sa nouvelle Constitution pour désigner le pouvoir central (ou fédéral).
2. Le cas de l'Union européenne
Sources : G. Isaac, Droit communautaire, Masson et B. Chantebout, Droit constitutionnel, Colin.
On peut s'interroger sur la nature de l'Union européenne, notamment depuis
ladoption du traité de Maastricht en 1992. Confédération
ou fédération ? La réponse semble si difficile à
donner que certains auteurs ont créé une catégorie sui
generis pour lUnion européenne. Par exemple, P. Pactet utilise
la notion d« organisation supranationale ». On peut considérer
que lUnion européenne est un système de coopération
original, très poussé dont le fonctionnement dans certains domaines
est proche de celui dune fédération. Pour autant, lUnion
européenne nest pas un devenue un Etat ; elle peut toujours être
assimilée à une confédération.
A. Historique
À lorigine, il a été question de créer une
Europe fédérale sur le modèle américain (les «
Etats-Unis dEurope »). Mais cette voie sest révélée
sans issue. Le projet Briand, présenté le 7 septembre 1929 à
lAssemblée générale de la SDN, na pas connu
de suite. Il en a été de même avec le « message aux
Européens » qui avait conclu le congrès des mouvements fédéralistes
les 8-10 mai 1948.
Le plan Shuman en tira les conséquences : il préfère une
intégration plutôt économique que politique, de procéder
par étapes en créant des solidarités de fait plutôt
que dun seul coup. Le postulat était quen procédant
de manière pragmatique, on fabriquerait un engrenage qui aboutirait finalement
à une solution fédérale. On suggéra de commencer
par la mise en commun de ressources comme le charbon et lacier (des ressources
nécessaires pour faire la guerre ; leur mise en commun entre la France
et lAllemagne devait empêcher toute nouvelle guerre). Lacceptation
de cette proposition par 5 Etats (Allemagne, Belgique, Italie, Luxembourg, Pays-Bas)
fut formalisée par la signature du premier grand traité européen
instituant le 18 avril 1951 la CECA.
On peut dire que cette idée a à la fois réussi et échoué
:
- la réussite, cest évidemment que lintégration
économique sest effectivement produite et renforcée jusquà
la création dune monnaie européenne unique. Dans ce domaine,
on peut parler dun fonctionnement quasi fédéral de la Communauté
européenne. Les étapes auront été les suivantes
:
La C.E.E.A. : la Communauté européenne de lénergie
atomique (Euratom) visant à promouvoir lutilisation de lénergie
nucléaire à des fins pacifiques et le développement dune
industrie nucléaire. 25 mars 1957
La C.E.E. : la Communauté économique européenne
qui tente de créer un marché commun, cest-à-dire
un marché unique étendu aux territoires des 6 états signataires.
Cela impliquait une union douanière (libre circulation interne des marchandises
et tarif douanier commun), la libre circulation des facteurs de production et
une protection de la libre concurrence. 25 mars 1957
Le S.M.E. : le système monétaire européen de 1978.
Les 6 et 7 juillet, le sommet de Brême décide d'instaurer un système
monétaire européen (SME). Il vise à établir en Europe
une zone monétaire stable, moins sensible aux grandes variations de taux
de change entre les monnaies européennes. Il se substitue au "serpent"
monétaire, constitué en 1972.
LA.U.E. : lActe unique européen de 1986. Il relance
la construction communautaire en prévoyant un marché intérieur
commun vraiment intégré qui est assorti du principe de solidarité
financière. Passage au vote à la majorité qualifiée
au sein du Conseil pour le rapprochement des législations. La coopération
en matière de politique étrangère fait lobjet de
dispositions conventionnelles et est étendue aux aspects économiques
et politiques de la sécurité.
Le traité de Maastrich de 1992 qui réforme le traité
CEE de 1957. Le traité CEE (maintenant CE) est complété
par des dispositions qui aménagent une Union économique et monétaire
; économique car est prévue une coordination des politiques économiques
des Etats membres et le respect du principe dune économie de marché
ouverte // monétaire car sont fixés de manière irrévocable
les taux de change entre monnaies européennes pour aboutir à linstauration
dune monnaie unique.
Le traité dAmsterdam de 1997 tente de faciliter la coopération
dans des domaines non communautarisés : Europe sociale, politique étrangère
et sécurité commune. Une communautarisation des politiques d'asile,
d'immigration et de libre circulation est prévue ainsi que l'intégration
de l'acquis de Schengen dans l'Union européenne.
Le traité de Nice de 2001 (entré en vigueur en 2003). Il prévoit une nouvelle répartition des sièges au Parlement européen, une nouvelle composition de la Commission et une nouvelle définition de la majorité qualifiée au Conseil. Les Etats membres les plus peuplés perdent à partir de 2005, la possibilité de proposer un deuxième commissaire.
- léchec, cest le fait que lintégration économique
na pas été relayée par une intégration politique
notamment dans les domaines de la diplomatie, de la sécurité intérieure
et extérieure. Dans ces domaines, il nexiste quune coopération
institutionnalisée de type confédéral. Le traité
de Maastricht a certes crée une entité nouvelle, lUnion
européenne chargée dharmoniser les politiques dans ces domaines
mais cette entité na pas de personnalité juridique et notamment
na pas de capacité dengagement international. Cet échec
sexplique par le fait que ne sest pas constitué comme lespéraient
les fédéralistes, un Peuple de lUnion, une Nation européenne
ou au moins une opinion publique européenne. On comprend alors pourquoi
lEurope a été incapable dagir de façon unie
notamment lorsque les conflits au sein de lex-Yougoslavie ont conduit
à des génocides à répétition ou encore lorsquil
sest agi de prendre position sur lintervention américaine
en Irak. Lidée dune souveraineté européenne
capable de subsumer les souverainetés nationales reste une utopie.
B.
Les structures de lUnion européenne.
Depuis lentrée en vigueur du Traité de Maastricht le 1er
novembre 1993, les organes de la Communauté européenne exercent
une double activité :
- une activité notamment judiciaire, administrative et surtout législative
en application des traités dans le domaine économique mais aussi
depuis 1993 dans des domaines comme léducation, la santé
publique, la culture, les transports
(il sagit des matières
dites « communautarisées »). On estime quà moyen
terme les 4/5èmes du droit national des Etats membres auront pour base
la réglementation européenne. Cette activité tend à
être fédérale sans pour autant donner à lUnion
européenne le statut dun véritable Etat fédéral.
- une activité de coopération dans les domaines de la politique
étrangère et de sécurité commune ou encore de la
justice et des affaires intérieures. Cette activité est de type
confédéral.
a. Lexécutif de lUnion européenne
3 éléments :
1. Le Conseil européen : cest la réunion des chefs dEtats
et de gouvernement à laquelle participe également le président
de la Commission. Il siège au moins deux fois par an. À lorigine,
ce nest ni une institution, ni un organe communautaire ; non prévu
pas les traités fondateurs, il est né dune simple initiative
politique. Mais son existence a été consacrée par lActe
unique de 1986. Le traité de Maastricht prévoit quil donne
à lUnion « les impulsions nécessaires à son
développement et en définit les orientations politiques générales
» sans pour autant prendre des actes juridiques. Il peut délibérer
de sujets relevant de la compétence communautaire et de la coopération
politique. Mais il peut agir aussi comme instance dappel pour les dossiers
qui lui sont renvoyés par les instances inférieures, spécialement
le Conseil des ministres.
2. Le Conseil : véritable institution communautaire chargée des
représenter les intérêts des Etats membres. Chaque Etat
y délègue le ministre compétent avec des instructions formelles
pour traiter du problème qui figure à lordre du jour de
la réunion. La plupart des décisions sont prises à la majorité
qualifiée dans les matières communautarisées (soit 62 voix
sur 87). Chaque Etat y dispose dun nombre de voix variable selon son importance.
En application du traité de Nice, les grands Etats disposeront de 29
voix chacun, lEspagne et la Pologne de 27 voix ; [Concernant ces deux
pays, il y a eu blocage sur ce point lors de ladoption de la Constitution
européenne car ils nont pas voulu renoncer à ce nombre de
voix]. Le Conseil détient le « pouvoir législatif »
quil exerce sous forme de directives et de règlements. Les règlements
sappliquent directement aux particuliers sur le territoire de lensemble
de la communauté. Les directives obligent seulement les Etats membres
à prendre chacun les mesures nécessaires à leur mise en
uvre en ayant le choix de la forme et des moyens. Le Conseil a aussi le
pouvoir « gouvernemental ». Ainsi, en matière de relations
extérieures, cest lui qui autorise louverture de négociations,
donne à la Commission ses mandats de négociation et conclut les
accords. En matière budgétaire, cest lui qui arrête
le projet de budget.
3. La Commission : elle est censée représenter lintérêt
commun de lUnion européenne. Elle est composée de 20 membres
nommés par les gouvernements des Etats pour 5 ans et renouvelables une
fois. Actuellement, les grands Etats désignent chacun deux commissaires,
et les petits chacun un. Le traité de Nice prévoit quà
partir de 2005, les grands Etats nauront plus quun seul commissaire,
mais du fait des adhésions, le nombre total sera porté à
27. La procédure de nomination est la suivante : les Etats désignent
après consultation du Parlement la personnalité appelée
à devenir Président de la Commission. En coopération avec
celui-ci, ils désignent ensuite les autres membres. Le collège
qui en résulte est soumis à un vote dapprobation du Parlement
européen et est ensuite nommé par les Etats. Chacun des commissaires
est spécialisé dans un domaine mais les décisions sont
prises collégialement. La Commission est responsable devant le Parlement
mais non devant les Etats ni devant le Conseil. Doù une grande
indépendance qui est renforcée par le fait que dans laccomplissement
de leurs tâches, les commissaires ne sollicitent dinstructions daucun
gouvernement ou organisme. La Commission a un triple rôle : 1 veiller
au respect des traités par les particuliers, les Etats ou autres institutions.
Pour cela elle dispose notamment du pouvoir de poursuivre les infractions et
dappliquer elle-même des sanctions. Vis-à-vis des Etats,
elle peut saisir la Cour de Justice pour faire constater des « manquements
». 2 mission générale dinitiative notamment dans lexercice
du pouvoir normatif attribué au Conseil. Les traités de Rome prévoient
que « le Conseil ne décide que sur proposition de la Commission
» ; le traité de Maastricht a ajouté que le Conseil ne peut
amender une proposition de la Commission quen votant à lunanimité
(art. 189 A C.E) et donne aussi un droit dinitiative indirect au Parlement
(art. 138 B, al. 2 C.E). Les propositions de la Commission sont lexpression
dune politique arrêtée par elle dans lintérêt
de lensemble de la Communauté. 3 mission dexécution
des traités et des actes du Conseil.
b. Le Parlement européen
Le Parlement crée en 1957 était composé de représentants
des Parlements nationaux. Depuis 1979, il est élu au SU direct par les
peuples des Etats membres. LActe unique de 1986 lui a conféré
le titre de « Parlement européen ». Pour autant, ce Parlement
souffre encore dun grave « déficit démocratique »
et de la faiblesse de ses attributions. Mal élu, peu connu des opinions
publiques, il ne détient pas la réalité du pouvoir législatif.
1. composition : 626 sièges. La répartition des sièges
par Etat tient compte du principe dégalité comme du souci
dassurer une représentation significative aux plus petits pays.
Les groupes parlementaires sont constitués en fonction daffinités
idéologiques et non de lappartenance nationale des députés.
Les élections dans chaque Etat sont marquées par un fort abstentionnisme
et la prédominance de thèmes non européens. Les Etats membres
nont pu se mettre daccord sur une procédure électorale
uniforme ; ils ont adopté un mode de scrutin en conformité avec
leurs traditions électorales sauf la France qui a choisi le scrutin proportionnel
dans un cadre national [La loi du 11 avril 2003 a cependant régionalisé
lélection].
2. statut des députés : ils sont élus pour 5 ans et ont
un mandat représentatif. Ils bénéficient de lirresponsabilité
(pas de poursuites pour les opinions et les votes émis dans lexercice
de leurs fonctions) et de linviolabilité (soit des immunités
reconnues aux membres du Parlement de leurs pays).
3. attributions :
- contrôle politique : possibilité notamment de poser des questions,
de disposer dun droit de pétition et denquête ; enfin
le Parlement peut contraindre la Commission à démissionner par
le vote dune motion de censure.
- pouvoir budgétaire
- rôle législatif : le Parlement est consulté obligatoirement
: le Conseil ne peut décider sans que le Parlement ait au préalable
donné un avis sur la proposition de la Commission. le Parlement
peut utiliser un veto suspensif voté à la majorité absolue
de ses membres qui oblige en pratique le Conseil et la Commission à prendre
ses amendements en considération (pouvoir de « codécision
»).
c. La Cour de Justice
La Cour de Justice de la Communauté est composée de 15 juges,
assistés de 8 avocats généraux ; tous sont nommés
pour 6 ans dun commun accord par les gouvernements (Art. 167 CE). Ils
sont renouvelables par moitié toutes les trois années. Ils sont
totalement indépendants des Etats. Les juges élisent eux-mêmes
en leur sein leur Président
La mission de la Cour est dassurer le respect des traités.
Elle est juge de la conformité aux traités des actes du Conseil
et de la Commission. Dans cette fonction, elle peut être saisie par les
Etats, les différentes institutions de la Communauté et par les
particuliers ayant un intérêt à agir. La Cour pourra ainsi
juger de recours en annulation.
Elle a aussi une activité interprétative ; elle peut être
saisie par les Etats membres pour interpréter la législation communautaire.
La procédure est la suivante ; une juridiction nationale ayant à
appliquer le droit communautaire à un litige porté devant elle
interroge la Cour en cas de doute. On dit que la Cour agit par la voie préjudicielle
(lintervention de la Cour ne constitue quun incident du litige quelle
ne tranche pas).
Enfin, la Cour peut également imposer aux Etats membres le respect des
obligations qui leur incombent en vertu des traités. Elle est alors saisie
par la Commission ou par un Etat membre après avis de la Commission.
C. Le fonctionnement de lUnion Européenne
Les organes de la Communauté sont appelés à jouer un double
rôle :
- dans les matières « communautarisées » (essentiellement
économiques), ces organes ont vocation à réaliser les buts
fixés par les traités (Cf. art. 2 et 3 du traité CE) comme
« létablissement dun marché commun »,
la mise en place dune « politique commerciale commune », ...
et à contrôler le respect des obligations souscrites par les Etats.
Pour cela ces organes disposent de compétences dont lampleur et
la nature sont sans commune mesure avec celles dont disposent les organisations
internationales classiques. On peut parler ici dun fonctionnement «
fédéraliste ».
- dans les matières non « communautarisées » (notamment
la sécurité intérieure et extérieure), les organes
de la Communauté tentent de coordonner les politiques des Etats membres.
Cette coopération est surtout mise en uvre par le Conseil statuant
en principe à lunanimité. On parlera ici dun fonctionnement
« confédéral ».
a. Le fonctionnement fédéral
La Communauté se devait dabord de réaliser un marché
commun pour la circulation des biens, des services, des travailleurs et des
capitaux. Comprenant ce rôle de manière large, elle a tenté
dharmoniser les réglementations des Etats membres dans des matières
qui navaient que des conséquences indirectes sur les échanges
: protection des consommateurs, de lenvironnement, recherche, aide aux
pays en voie de développement
Larticle 3 (du traité
CE) réformé par la traité de Maastricht consacre ce rôle
élargi et prévoit que la Communauté est compétente
dans des domaines qui ne sont plus seulement économiques comme léducation,
la santé, la culture, la politique sociale
Les compétences sont mises en uvres par le Conseil sur proposition
de la Commission. Mais en réalité, la Commission est lorgane
moteur. Dune part, le Conseil ne peut statuer que sur ses propositions.
Dautre part, il ne peut en pratique que les approuver ou les rejeter car
il ne peut les amender quà lunanimité. À lopposé,
la Commission peut modifier à tout moment ses propositions au cours de
leur discussion par le Conseil ; ce qui lui permet de dégager un compromis
entre les Etats sans renoncer à sa position. Le Parlement peut dans de
nombreux domaines (éducation, santé, culture
) bloquer ladoption
dun texte à la majorité absolue de ses membres. Le Conseil
et la Commission prennent alors les amendements du Parlement en considération
(pouvoir de « codécision »).
Pour autant, laspect fédéral de ce fonctionnement doit être
relativisé pour plusieurs raisons :
- Lexistence du principe de subsidiarité : la Communauté
ne peut intervenir quà la condition que son action permette dobtenir
de meilleurs résultats que laction individuelle des Etats membres.
- Les traités naccordent pas aux institutions le pouvoir dappliquer
la contrainte aux particuliers ; ils font seulement obligation aux Etats membres
dexécuter par la force les actes des institutions (art. 192 C.E.)
- Si les Communautés ne jouissent que dune compétence dattribution
(comme dans le cas des Etats fédéraux), les traités nénumèrent
pas des matières comme le veut la technique fédérale ;
ils désignent des objectifs à atteindre, des actions à
mener, des fonctions à remplir.
- Si le droit communautaire en raison de sa spécificité est d
« applicabilité directe » (Van Gend et Loos C.J.C.E. 1963)
contrairement à ce qui se passe dans le cadre dun traité
international classique, il reste un droit externe ; sa primauté par
rapport au droit interne est donc soumise à la médiation de la
Constitution des Etats membres. Cest le cas en France puisque larticle
55 ne prévoit que la seule primauté de la loi sur les traités
; et cette primauté nest appliquée par le Conseil dÉtat
et la Cour de Cassation non pas directement mais précisément en
raison de lhabilitation de larticle 55. b. Le fonctionnement confédéral
Le domaine de la coopération institutionnalisée couvre outre la
politique étrangère et la défense (le deuxième pilier
de lUnion), la justice et la police (le troisième pilier). Cette
coopération est mise en uvre par le Conseil. Elle a été
développée par le Traité de Maastricht.
- La politique étrangère et de sécurité commune
(la PESDC) tout en restant une affaire nationale doit faire lobjet dune
concertation au sein du Conseil sur la base des orientations générales
fixées par le Conseil européen. Votant à lunanimité,
le Conseil peut définir une position commune qui impose aux Etats dy
conformer leur politique nationale et de prendre chacun les mesures arrêtées
ensuite par le Conseil à la majorité qualifiée. Lorsquune
affaire déterminée met en cause des « intérêts
communs importants », le Conseil peut aller jusquà décider
une action commune. Cette action commune engage les Etats membres qui doivent
informer le Conseil des mesures quils décident pour lexécuter
de façon à permettre une concertation.
Le traité de Maastricht inclut à cette coopération lensemble
des questions relatives à la sécurité de lUnion,
« y compris la définition à terme dune politique de
défense commune qui pourrait conduire le moment venu à une défense
commune » ; ce qui lève un tabou né de léchec
de la CED. La création par le traité dAmsterdam dun
Haut représentant pour la PESDC a été un premier pas dans
cette direction ainsi que la formation dune « force de réaction
rapide » décidée au Conseil européen dHelsinki
de 1999. Enfin, le traité de Maastricht considère lUEO,
seule véritable alliance ouest européenne comme le bras armé
de lUnion qui doit élaborer et mettre en uvre les décisions
de lUnion ayant des implications dans le domaine de la défense.
Il reste que la division spectaculaire de lEurope sur le soutien vis-à-vis
de lintervention américaine en Irak (2002-2003) a démontré
une fois de plus que la mise en place dune politique étrangère
commune restait une utopie.
- La mise en place dune coopération dans les domaines de la justice
et des affaires intérieures (police) est la conséquence de la
totale liberté de circulation des personnes dans la Communauté.
Elle témoigne aussi du refus de la majorité des Etats membres
daccepter la communautarisation dune matière aussi sensible.
Sont concernés la politique dasile, les règles régissant
le franchissement des frontières extérieures, la politique dimmigration,
la coopération douanière et policière
On opère
selon les mêmes règles que pour la politique étrangère
: recherche de positions communes et mise en uvre dactions communes.
Cependant la Commission dispose dun droit dinitiative concurremment
à chacun des Etats et peut participer aux négociations. La création
dun mandat darrêt européen qui a exigé une révision
de la Constitution en mars 2003 (article 88-2 alinéa 3) montre les difficultés
de mise en place de cette coopération.
D. La tentative d'instaurer une « Constitution » européenne et le nouveau "traité modificatif".
L'échec de la tentative d'instaurer une "constitution" européenne
a débouché récemment sur la mise en place d'un mini traité
dont voici le contenu :
Voici les principaux points du traité modificatif qui devrait entrer
en vigueur mi-2009.
Alors que la Constitution remplaçait tous les traités précédents,
par souci de clarté, le nouveau traité « modificatif »
amendera les traités de Rome (1957) et le traité de l'Union européenne
(1992), comme l'avaient fait les traités d'Amsterdam (1996) et de Nice
(2000).
- Système de vote : Les règles de vote actuelles, définies
par le traité de Nice continueront à s'appliquer jusqu'en 2014.
La règle de la double majorité prévue par la Constitution
entrera en vigueur le 1er novembre 2014 : une décision sera adoptée
si elle obtient le soutien de 55 % des États membres représentant
65 % de la population de l'Union. Du 1er novembre 2014 au 31 mars 2017, un État
membre pourra toujours demander l'application du système de Nice. Jusqu'en
2017, le système de « Ioanina » s'applique. Il permet à
un groupe d'État risquant d'être mis en minorité de prolonger
la discussion. Ce système est renforcé à partir de 2017.
Le champ d'application de la majorité qualifiée est étendu
à une quarantaine de domaines, principalement la coopération judiciaire
pénale et policière. La Grande-Bretagne et l'Irlande bénéficient
d'un opting in dans les affaires de justice et de police : elles peuvent participer
aux politiques communes lorsqu'elles le souhaitent. L'unanimité demeure
la règle pour la politique étrangère, la fiscalité,
la politique sociale, les ressources de l'UE ou la révision des traités.
- Terminologie, symboles Les symboles (drapeau, hymne, devise) ne figurent plus
dans les traités, même si ces derniers continueront à exister.
Les expressions « loi » et « loi-cadre européenne »
sont abandonnées au profit de règlements, directives, décisions.
- Présidence Un président stable du Conseil européen sera
élu par ses pairs pour deux ans et demi, au lieu de l'actuelle rotation
semestrielle par pays.
- Commission européenne La Commission européenne comptera, à
partir de 2014, un nombre de commissaires égal à deux tiers du
nombre d'États membres. Les pays seront représentés sur
la base d'une « rotation égalitaire ».
- Diplomatie de l'UE Le titre de « ministre » des Affaires étrangères
est supprimé. Il est remplacé par celui de « haut-représentant
pour la Politique étrangère et la Sécurité ».
En 2009, il sera aussi vice-président de la Commission. Il disposera
d'un service diplomatique propre (service pour l'action extérieure).
- Charte des droits La charte des droits fondamentaux ne sera plus reprise in
extenso. Un article y fera référence. Son caractère juridiquement
contraignant est maintenu. Londres bénéficie d'une dérogation
à son application. La Pologne a obtenu la garantie que la charte «
ne porte atteinte en aucune manière au droit des États de légiférer
dans le domaine de la moralité publique, du droit de la famille, de la
protection de la dignité humaine, de l'intégrité humaine
physique et morale ».
- Coopérations renforcées Elles sont facilitées et étendues
aux domaines judiciaires et policiers. La création d'un parquet européen
devient possible.
- Contrôles des Parlements nationaux Les Parlements nationaux pourront
demander à la Commission européenne de réexaminer une proposition
s'ils jugent qu'elle empiète trop sur les compétences nationales.
Si la Commission ne les suit pas, ils pourront demander aux États membres
de la bloquer.
- Énergie : La solidarité doit s'appliquer, si de graves difficultés
d'approvisionnement surviennent, notamment pour les produits énergétiques.
Les traités garantiront la solidarité énergétique
entre États membres.
- Changement climatique : L'Union doit promouvoir au plan international des
mesures destinées à lutter contre les changements climatiques.
Elle dispose d'une nouvelle base juridique pour agir au niveau européen.
- Concurrence : La concurrence libre et non faussée disparaît des
« objectifs de l'UE » tels que définis par la Constitution.
Un protocole a été ajouté précisant que le marché
intérieur nécessitait « un système où la concurrence
n'est pas faussée ».
- Services publics : Un protocole souligne leur « rôle essentiel
» et « la grande marge de manoeuvre » des États membres
dans « la fourniture, la mise en service et l'organisation » des
services publics.
RETOUR sur la défunte Constitution européenne :
Le Conseil européen réuni à Laeken en décembre 2001 avait chargé une « Convention sur lavenir de lEurope » de proposer en juin 2003 une refonte des structures de lUnion, sous la forme dun « traité constitutionnel » qui doit, après approbation des gouvernements et des Parlements nationaux, être soumis à référendum dans les Etats membres. La déclaration de Laeken avait posé un certain nombre de questions : comment renforcer la capacité d'impulsion de l'Union et donner à la fois un leadership et un visage à l'Europe ? Selon quelles règles répartir les compétences entre l'Union et les Etats membres ? Comment simplifier et rendre compréhensible l'Europe auprès des citoyens ? Par quels moyens rapprocher l'Europe des peuples et améliorer son fonctionnement démocratique ? Un projet de Constitution a été présenté au Conseil européen de Thessalonique en juin 2003 ; il devait être ensuite examiné par une Conférence intergouvernementale. La Conférence intergouvernementale s'est ouverte à Rome le 4 octobre 2003 dans un climat d'incertitude, parfois de défiance, marqué par l'opposition de deux pays, l'Espagne et la Pologne, au compromis institutionnel que proposait la Convention. L'échec du Conseil européen du 13 décembre 2003 allait plonger l'Union dans le doute. Finalement le 18 juin 2004, un accord a été trouvé entre les chefs dEtat et de gouvernements.
La victoire du non lors des réferendums en France et aux Pays-Bas a compromis l'avenir de la Constitution européeenne.
Voir :
Le projet de Constitution
européenne et le
rapport dinformation de lAssemblée nationale
a) Les apports
de la « Constitution » européenne
1. Architecture institutionnelle
- Une présidence stable du Conseil européen (article I-21)
Suppression de la présidence semestrielle du Conseil européen
et remplacement par un Président stable élu pour un mandat de
deux ans et demi renouvelable une fois. Le Président du Conseil européen
sera un président à temps plein, en raison de l'interdiction d'un
cumul avec un mandat national.
- La désignation du Président de la Commission (article I-26).
Alors que le traité actuel prévoit qu'il est désigné
par le Conseil européen puis soumis à l'approbation du Parlement
européen, la Constitution énonce désormais que la proposition
du Conseil européen, statuant à la majorité qualifiée,
doit tenir compte des élections au Parlement européen. Le candidat
proposé par le Conseil européen - après qu'il ait été
procédé aux consultations appropriées, c'est-à-dire
avec le Parlement européen - doit être élu par le Parlement
européen à la majorité des membres qui le composent. Si
tel n'est pas le cas, le Conseil européen, statuant à la majorité
qualifiée, propose dans le délai d'un mois un nouveau candidat
qui devra être élu par le Parlement européen selon la même
procédure.
- Le ministre européen des affaires étrangères (article
I-27)
La Constitution créée un ministre des affaires étrangères
de l'Union à « double casquette », réunissant les
fonctions de Haut représentant et de Commissaire chargé des relations
extérieures qu'il devra exercer selon les procédures propres à
chaque domaine.
Le ministre des affaires étrangères de l'Union est nommé
et révoqué par le Conseil européen statuant à la
majorité qualifiée, avec l'accord du Président de la Commission.
Il est soumis, avec le reste du collège des commissaires, à un
vote d'approbation par le Parlement européen, qui peut le démettre
des fonctions exercées au sein de la Commission en adoptant une motion
de censure contre ce même collège. Il doit également démissionner
si le Président de la Commission le propose, et si le Conseil européen,
d'un commun accord avec le Président de la Commission, le décide.
Le ministre des affaires étrangères préside le Conseil
des affaires étrangères de l'Union. Il a pour missions de conduire
la politique étrangère et de sécurité commune, de
contribuer à son élaboration et de l'exécuter en tant que
mandataire du Conseil ; il agit de même en ce qui concerne la politique
de sécurité et de défense.
La Constitution invite le ministre des affaires étrangères à
rechercher les consensus. En effet, si un membre du Conseil déclare que,
pour des raisons de politique nationale vitales et qu'il expose, il a l'intention
de s'opposer à l'adoption d'une décision européenne devant
être adoptée à la majorité qualifiée, il n'est
pas procédé au vote. Le ministre des Affaires étrangères
de l'Union doit alors rechercher, en étroite consultation avec l'Etat
membre concerné, une solution acceptable pour celui-ci.
2. La personnalité juridique de lUnion (article I-6)
Si la Communauté européenne bénéficie actuellement
de la personnalité juridique (article 281 TCE), les dispositions des
traités restent ambiguës quant à la personnalité juridique
de l'Union. La Constitution reconnaît donc explicitement cette personnalité
juridique. Il s'agit cependant d'une confirmation plus que d'un véritable
changement, l'Union européenne s'étant déjà vu reconnaître
le pouvoir de conclure des accords internationaux avec des pays tiers (tels
ceux conclus entre l'Union et les Etats-Unis, le 25 juin 2003, en matière
d'extradition et d'entraide judiciaire).
Ainsi, la simplification des traités peut se faire à travers la
fusion dans un texte unique et une personnalité morale unique - l'Union
- que réalise la Constitution. En conséquence, les trois «
piliers » sont supprimés, et il ne demeure plus que l'Union avec
des procédures de décision différenciées selon les
domaines d'action.
3. La répartition des compétences
La clarification de la répartition des compétences était
un point central du mandat de la Convention, et figurait parmi les quatre questions
posées par la Déclaration sur l'avenir de l'Union, annexée
au traité de Nice. La Déclaration de Laeken, adoptée en
décembre 2001, dégageait également un certain nombre de
pistes de réflexion vers une clarification du système actuel.
La classification des compétences (article I-11)
La Conférence intergouvernementale n'est pas revenue sur la classification
des compétences envisagée dans le projet élaboré
par la Convention, et la Constitution reprend le principe selon lequel «
toute compétence non attribuée à l'Union dans la Constitution
appartient aux Etats membres ». Dans le respect des principes de subsidiarité
et de proportionnalité, la Constitution présente désormais
une liste des compétences organisées selon trois catégories
:
- les compétences exclusives (article I-12) ;
- les compétences partagées (article I-13) ;
- les actions d'appui, de coordination ou de complément (article I-16).
A côté des compétences de l'Union relevant de ces trois
catégories, la Constitution traite à part, et sans changement
sur le fond (en termes de compétences), par rapport aux traités
actuels, les compétences de coordination de l'Union en matière
économique (en ajoutant toutefois explicitement les politiques de l'emploi),
et les compétences de l'Union dans le domaine de la politique étrangère
et de la défense.
Par ailleurs, la Constitution officialise la « méthode ouverte
de coordination », en particulier dans le domaine social, de la recherche,
de la santé publique et de l'industrie.
La clause de flexibilité (article I-17)
La Constitution maintient la clause de flexibilité qui, sous sa forme
actuelle (article 308 TCE) autorise une action de la Communauté alors
même que le traité n'a pas prévu les pouvoirs d'action requis,
dès lors que cette action « apparaît nécessaire pour
réaliser, dans le fonctionnement du marché commun, l'un des objets
de la Communauté ».
La Constitution propose une formulation plus large, qui ne fait plus référence
au fonctionnement du marché intérieur et ne s'applique plus seulement
aux questions relevant du « pilier » communautaire.
Les nouvelles dispositions de l'article I-17 de la Constitution s'appliquent
ainsi à l'ensemble des objectifs et des politiques de l'Union. En revanche,
la Constitution rend plus contraignante la procédure de recours à
cette flexibilité en la soumettant à l'information préalable
des Parlements nationaux et à l'approbation (et non plus l'avis) du Parlement
européen.
L'instauration d'un mécanisme de contrôle du respect du
principe de subsidiarité.
Afin de contrôler que l'Union n'intervienne pas dans des domaines où
elle n'est pas compétente, un protocole annexé à la Constitution
prévoit un mécanisme de contrôle du respect du principe
de subsidiarité, confié aux Parlements nationaux. Il s'agit d'un
contrôle politique ex ante qui peut se doubler d'un contrôle juridictionnel
ex post.
La Commission européenne sera désormais dans l'obligation de motiver
systématiquement ses propositions législatives au regard des principes
de subsidiarité et de proportionnalité. Chaque Parlement national
(et chaque chambre dans le cas des Parlements bicaméraux) pourra, dans
le délai de six semaines à compter de la réception de la
proposition législative, émettre un avis motivé contenant
les raisons pour lesquelles la proposition en cause serait considérée
comme non conforme au principe de subsidiarité.
Un second contrôle, de nature juridictionnelle, est également possible,
après l'entrée en vigueur d'un acte européen. Les Parlements
nationaux, par l'intermédiaire de leurs gouvernements respectifs et le
Comité des Régions - pour les actes pour lesquels la Constitution
prévoit sa consultation - auront la possibilité de saisir la Cour
de justice de l'Union européenne.
4. Une meilleure prise en compte du rôle des Parlements nationaux
5. La réduction du nombre d'instruments juridiques.
La Constitution ramène de quinze à six le nombre des instruments
juridiques et instaure une hiérarchie des normes en distinguant entre
les actes législatifs, d'une part, et les actes d'exécution, d'autre
part.
- Les actes législatifs (article I-33) sont au nombre de deux : la loi
européenne et la loi-cadre européenne. Ils contiennent les éléments
essentiels et opèrent les choix politiques fondamentaux de l'Union.
- Les actes d'exécution (article I-36) sont le règlement et la
décision. Ils sont utilisés pour la mise en uvre des actes
législatifs et relèvent en règle générale
de la compétence de la Commission, et à titre exceptionnel, de
celle du Conseil.
La Constitution prévoit également des instruments juridiques spécifiques
dans certains domaines tels que la PESC. La Constitution mentionne deux instruments
juridiquement non contraignants que sont la recommandation et l'avis.
Une nouvelle catégorie d'instruments est créée avec les
« règlements européens délégués »
(article I-35) qui peuvent compléter ou modifier certains éléments
non essentiels de la loi ou de la loi-cadre européenne. Cette délégation
législative s'accompagne toutefois d'un droit d'évocation («
call back ») permettant au législateur de contrôler la mise
en uvre, par la Commission, de ce pouvoir législatif délégué.
6. La confirmation d'un droit d'initiative populaire (article I-46 § 4)
La Constitution, conformément à ce qu'avait proposé la
Convention, prévoit la possibilité pour au moins au million de
ressortissants d'un nombre significatif d'Etats membres, d'inviter la Commission,
dans le cadre de ses attributions, à soumettre une proposition d'acte
juridique sur un sujet particulier, sans pour autant qu'elle soit dans l'obligation
juridique de le faire. La Conférence intergouvernementale est venue préciser
que la loi européenne qui définira la procédure requise
pour la présentation d'une telle initiative citoyenne, devra prévoir
le nombre minimum d'Etats membres dont les ressortissants qui la présentent
devront provenir. Il s'agit d'éviter que de telles initiatives soient
détournées au profit de groupes d'intérêt nationaux
émanant d'Etats fortement peuplés et pour lesquels la réunion
d'un million de signature pourrait intervenir essentiellement dans le cadre
national.
7. Le nouveau compromis
institutionnel
Au sein de la Conférence intergouvernementale, les débats institutionnels
se sont focalisés sur deux questions majeures : la composition de la
Commission européenne et la définition de la règle de la
majorité qualifiée.
La composition de la Commission (article I-25)
Les négociations sur la composition de la Commission ont fait partie
du « paquet final » de la négociation au sein de la Conférence
intergouvernementale. Alors que le projet initial de la Convention prévoyait
le passage à un collège resserré dès 2009 (quinze
Commissaires européens - y compris le Président et le ministre
européen des Affaires étrangères - et des commissaires
sans droit de vote pour les Etats non représentés), une majorité
de pays membres souhaitait le maintien du principe d'un commissaire par Etat
membre. Cette exigence était notamment formulée par les nouveaux
pays membres qui ont rejoint l'Union le 1er mai 2004. En effet, même si
la Commission ne représente pas les Etats membres, chaque pays entend
être présent au sein du collège des commissaires afin de
permettre la prise en compte de positions nationales. Or dans une Europe qui
sera bientôt composée d'une trentaine d'Etats membres, une extension
systématique de la taille du collège rendra la Commission rapidement
ingouvernable, au détriment de l'intérêt général
européen ; la légitimité de la Commission se trouverait
également altérée.
L'accord finalement obtenu prévoit que la Commission comprendra un Commissaire
par Etat membre jusqu'en 2014 (ce qui correspond aux deux prochaines législatures
du Parlement européen). C'est davantage que ce que prévoit le
traité de Nice puisque le protocole sur l'élargissement de l'Union
européenne énonce que « lorsque l'Union compte 27 Etats
membres (...) le nombre des membres de la Commission est inférieur au
nombre d'Etats membres ». En revanche, la Constitution européenne
prévoit dès à présent qu'à partir de 2014,
la composition de la Commission correspondra aux deux tiers du nombre des Etats
membres. Ainsi, dans une Union à 27, la Commission sera composée
de 18 membres ; cela signifie qu'un pays sera représenté dans
deux collèges sur trois, sur la base d'une rotation égalitaire.
La Constitution garantit donc le principe d'un collège resserré
en contrepartie d'une entrée en vigueur des nouvelles règles en
2014 et non en 2009, ce qui permet de clore définitivement cette négociation.
Le nombre de membres de la Commission pourra toutefois être modifié
sans qu'il soit nécessaire de procéder à une révision
de la Constitution, puisqu'il suffira d'une décision du Conseil européen,
statuant à l'unanimité.
La définition de la majorité qualifiée (article
I-24) au sein du Conseil des ministres et du Conseil européen
Au cur du clivage qui a opposé les « petits » aux «
grands » pays, la définition de la majorité qualifiée
a bien failli faire échouer la négociation sur la Constitution
européenne. L'Espagne et la Pologne avaient déjà fait part,
au sein de la Convention, de leur hostilité au principe même de
cette double majorité, qui leur est moins favorable que les dispositions
sur la pondération des voix prévues par le traité de Nice.
Mais l'évolution de la position espagnole consécutive au changement
de gouvernement a finalement ouvert la voie à un compromis sur cette
question. La solution retenue par la Conférence intergouvernementale
préserve l'essentiel, à savoir cette double majorité qui
combine une double légitimité sur laquelle repose l'Union européenne
en tant que « fédération d'Etats nations » : d'une
part, la légitimité des Etats, d'autre part, celle des peuples.
- Le relèvement des seuils
La proposition initiale de la Convention avait le mérite de la simplicité
puisqu'une décision était réputée adoptée
dès lors qu'elle réunissait une majorité de 50 % des Etats
représentant 60 % de la population.
L'objectif était ainsi de favoriser les coalitions gagnantes bien davantage
que les minorités de blocage. En effet, de 2 % avec le mécanisme
de pondération des voix du traité de Nice, le nombre de coalitions
gagnantes atteignait près de 22 % avec le système proposé
par la Convention (dans l'hypothèse d'une Union à 27 membres).
Or l'Espagne et la Pologne principalement, mais aussi certains pays moins peuplés,
ont estimé que la double majorité donnait un poids trop important
aux Etats les plus peuplés.
Dès lors que l'ensemble des délégations ont admis le principe
même de la double majorité, les négociations ont porté
sur la modification des seuils proposés par la Convention. L'Espagne
et la Pologne demandaient le relèvement du seuil démographique
tandis que les « petits » pays entendaient veiller à ce que
l'écart entre les deux seuils soit au moins maintenu afin de ne pas réduire
leur poids relatif. En conséquence, les chefs d'Etat et de gouvernement
se sont accordés sur une augmentation identique des deux seuils : de
50 % à 55 % pour le seuil du nombre d'Etats membres, et de 60 % à
65 % pour le seuil démographique.
L'article I-24 ajoute une condition au seuil de 55 % en exigeant la réunion
d'au moins quinze Etats membres. On peut s'interroger sur la pertinence de cette
disposition dans la mesure où le mécanisme de double majorité
n'est prévu pour entrer en vigueur qu'en 2009, date à laquelle
l'Union européenne comptera probablement 27 Etats membres avec l'adhésion
de la Bulgarie et de la Roumanie. Or à partir de 26 Etats membres, le
seuil de 55 % correspondra arithmétiquement à un minimum de quinze
Etats membres. Cette condition supplémentaire sera donc vraisemblablement
caduque avant même son entrée en vigueur.
Il faut également préciser que les abstentions ne sont pas prises
en compte pour atteindre une majorité, qui se calcule sur la base du
nombre des Etats membres et non des votes positifs.
- La définition d'une minorité de blocage
La Constitution prévoit qu'une minorité de blocage doit inclure
au moins quatre membres du Conseil, faute de quoi la majorité qualifiée
est considérée comme atteinte. Cette disposition a été
ajoutée à la demande des « petits » pays afin d'éviter
que trois Etats membres parmi les plus peuplés, représentant plus
de 35 % de la population, puissent empêcher une décision. Il s'agit
là d'une traduction juridique de la prise en compte de l'égalité
des Etats, de sorte que le critère démographique n'ait pas pour
effet de neutraliser le critère des Etats.
Par dérogation à ce qui précède, la majorité
qualifiée est fixée à 72 % des Etats (au lieu de 55 %)
représentant toujours 65 % de la population dans tous les cas où
la proposition n'émane pas de la Commission ou du ministre des Affaires
étrangères. Il s'agit notamment des initiatives des Etats membres
dans le domaine de la Justice et des Affaires intérieures, des initiatives
du Conseil en matière de PESC, des actes pris dans le cadre de la politique
économique et monétaire sur recommandation de la Commission ou
de la BCE, des propositions qui émanent du Parlement européen,
de la suspension ou du retrait d'un Etat membre, ou encore de diverses nominations.
- L'introduction d'un mécanisme de « Ioannina »
Est annexée à la Constitution un projet de décision qui
sera adopté le jour de l'entrée en vigueur de la Constitution.
Ce texte instaure un système calqué sur le « compromis de
Ioannina » relatif à la mise en uvre de l'article I-24 en
prévoyant que si des membres du Conseil représentant au moins
3ž4 de la population de l'Union ou au moins 3ž4 du nombre des Etats membres
nécessaires pour constituer une minorité de blocage, indiquent
leur opposition à l'adoption d'un acte par le Conseil à la majorité
qualifiée, le Conseil doit débattre de cette question afin de
parvenir à une solution dans un délai raisonnable. Alors seulement,
il pourra être procédé au vote. Ce système s'appliquera
à compter du 1er novembre 2009, et au moins jusqu'en 2014. A partir de
cette date seulement, le Conseil pourrait adopter une décision l'abrogeant.
Le Conseil de l'Union (articles I-22 et I-23)
La suppression du Conseil législatif (article I-23)
Dans un souci de simplification et de transparence, la Convention proposait
de confier la fonction législative à une formation unique du Conseil.
Un consensus s'est pourtant rapidement dégagé au sein de la Conférence
intergouvernementale en faveur de la suppression d'un tel Conseil législatif
unique, et du maintien des différentes formations sectorielles.
En revanche, la Constitution prévoit que chaque session du Conseil est
divisée en deux parties, consacrées respectivement aux délibérations
sur les actes législatifs de l'Union et aux activités non législatives.
Dès lors qu'il délibère et vote sur un projet d'acte législatif,
le Conseil siège en public. En vertu du Protocole sur le rôle des
Parlements nationaux, ceux-ci sont directement destinataires des ordres du jour
et des procès verbaux de ces réunions.
La Constitution mentionne directement deux formations du Conseil :
- le Conseil des affaires générales, qui « assure la cohérence
des travaux des différentes formations du Conseil. Il prépare
les réunions du Conseil européen et en assure le suivi en liaison
avec le Président du Conseil européen et la Commission »
;
- le Conseil des affaires étrangères, présidé par
le ministre européen des affaires étrangères, qui «
élabore l'action extérieure de l'Union selon les lignes stratégiques
fixées par le Conseil européen et assure la cohérence de
l'action de l'Union ». Le régime juridique des coopérations
renforcées (articles I-43 et III-322 et suivants)
8.La politique
de sécurité et de défense commune
Avec le Protocole sur la coopération structurée permanente, la
Conférence intergouvernementale est allée au-delà des ambitions
initiales formulées par la Convention, tout en ouvrant à l'ensemble
des pays de l'Union la participation à tous les aspects de la politique
de sécurité et de défense commune.
B)
Les limites de la « Constitution » européenne
- Malgré le terme de « Constitution » européenne qui
peut faire penser quil sagit là dune Constitution fédérale
constitutive dun ordre juridique parfaitement intégré à
celui des Etats membre, la Constitution européenne est bien un traité
international ; elle a été voulue et écrite par les Etats
membres souverains. Il faut parler d« un projet de traité
établissant une Constitution pour lEurope ».
Sans doute, le traité a bien une fonction constitutionnelle au sens matériel
puisquil organise le statut dinstitutions qui ont une allure étatique.
Mais au sens formel la Constitution européenne na pas le statut
dune norme suprême pour les Etats membres. La supériorité
du droit communautaire nest pas directe ; elle nécessite le relais
des Constitutions des Etats membres et de leurs juridictions.
- LUnion ne change pas de nature ; ce nest pas un Etat fédéral
:
Ainsi, il nexiste pas de véritable gouvernement économique
et social pour l'Union. Ou encore on a seulement un embryon d'une véritable
politique de défense intégrée.
Les relations entre les organes restent inégalitaires et inachevées,
non conformes à lidée de séparation des pouvoirs
: ainsi, le Parlement européen ne détient pas le pouvoir législatif
; son pouvoir de censurer la Commission n'a pas pour contrepartie la possibilité
d'une dissolution du Parlement européen, d'un renvoi devant les électeurs
en cas de blocage.
La répartition des compétences reste floue.