COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL GÉNÉRAL

 

Cours écrit par O. CAMY
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Plan détaillé du cours




Titre I. Présentation critique du droit constitutionnel occidental classique



Section 1. Les formes d'Etat

S 1. Les gouvernements

§ 2. Les régimes politiques



Classiquement, les Etats peuvent être distingués selon l’origine de la souveraineté qui les fondent et la manière dont le pouvoir d’Etat est exerce. On parlera dans un cas de gouvernements et dans l’autre cas de régimes (politiques). La recherche d’une classification des gouvernements est pratiquée depuis l’Antiquité ; Platon et Aristote en avaient déjà établi une. La typologie des régimes est plus récente. Elle a été développée surtout à l’époque moderne, soit à partir du 18e siècle. On peut tout à fait combiner ces deux genres de typologies.


§ 1. Les gouvernements


1. La notion de gouvernement
A définition
Les gouvernements (forma imperii) sont classés selon l’origine de la souveraineté. La distinction repose sur la réponse à la question : « Qui gouverne et au nom de quoi ? ».
B origine
Ce critère a été utilisé par la pensée politique notamment à partir de Platon et Aristote. Pour différencier les Etats, ces auteurs ont recherché qui gouvernait au sens large, ou encore qui était titulaire du pouvoir d’édicter les normes juridiques. Ils ont ainsi décrit des formes de gouvernement dont certaines sont devenues archaïques. Il en est ainsi de la « timocratie » (gouvernement de ceux qui recherchent les honneurs).
Un tel critère est avant tout qualitatif (notamment pour Platon). En effet, chaque forme de gouvernement est associée à certains caractères que l’on retrouve dans les Constitutions de ces gouvernements et chez les gouvernants eux-mêmes (il s’agit de leurs « âmes »). La prise en compte de ces caractères permet alors de juger et de hiérarchiser les formes de gouvernement.
Par exemple, chez Platon (La République, livre VIII), on trouve cette hiérarchie : 1. l’aristocratie des « rois-philosophes » est associée à la sagesse 2. la timocratie est associée à la recherche des honneurs 3. l’oligarchie est le gouvernement de ceux qui sont avides de richesse 4. la démocratie est fondée sur la tolérance et l’égalitarisme 5. la tyrannie repose sur les passions (la peur, le désir bestial)
C évolution
Les théoriciens modernes de l’Etat (Bodin, Hobbes, Montesquieu) restent encore fidèles à ce critère. Par exemple Hobbes dans le Léviathan explique que « la différence qui existe entre les Républiques repose sur celle qui se trouve entre leurs souverains... ». D’où sa distinction entre trois types de Républiques (ou États) :
1 quand le représentant (celui qui détient le pouvoir souverain) est un seul homme, la République est une Monarchie
2 quand « c’est l’assemblée de tous qui voudront part à la réunion, c’est une démocratie ou une République populaire »
3 quand « c’est l’assemblée d’une partie seulement de l’ensemble, on l’appelle Aristocratie » (p. 192).
Mais ils vont tenter de rationaliser la typologie fondée sur ce critère. C’est le cas de Montesquieu qui veut s’appuyer sur les lois ou les Constitutions pour déterminer ce qu’il appelle « le principe » ou ce qui fait agir chaque gouvernement. Il ne s’agit plus dit-il de s’appuyer sur « des choses d’accident comme les vertus ou les vices du prince » tel Aristote. (p. 306 L’esprit des lois). Ils vont aussi hiérarchiser les gouvernements de manière nouvelle : ainsi, pour Montesquieu : la République (principe : vertu), la Monarchie (principe : honneur), le Despotisme (principe : crainte).


2. Les types de gouvernement

On peut distinguer entre deux types de gouvernement qui chacun peut connaître une dérive autoritaire.
a) les gouvernements de droit divin
Ils sont fondés sur une souveraineté divine. Dieu est le souverain ; mais la souveraineté est exercée par ceux qui le représentent sur terre. Ce postulat ou cette croyance permet d’introduire une limitation a priori du pouvoir d’Etat : référence divine, loi divine ou droit naturel.
En Occident, les gouvernements de droit divin qui ont pris la forme de royauté (un roi est le dépositaire de l’autorité souveraine au nom de Dieu) ont disparu à partir de l’époque moderne. Certains avaient dérivé en absolutismes : le Roi prétend avoir été désigné par Dieu et avoir le monopole de l’exercice de l’autorité souveraine. En Orient, les gouvernements de droit divin inspirés par l’Islam ont pris la forme de monarchies ou sultanats qui ont eux aussi connu la même dérive absolutiste. Certains de ces gouvernements ont survécu à l’avènement de la souveraineté démocratique qui a eu lieu notamment en Turquie et dans le Maghreb (Algérie, Tunisie...). Par exemple, les monarchies du golfe. L’intégrisme islamique a tenté de ressusciter l’idée de gouvernement de droit divin mais sur un mode souvent autoritaire. Il a essayé ainsi de justifier une confusion des pouvoirs au profit d’un guide religieux ou d’un clergé et la déduction du droit à partir de la seule loi divine. Cet intégrisme est aujourd’hui en échec : remise en cause du pouvoir des religieux en Iran, effondrement de l’Etat taliban en Afghanistan.
b) les gouvernements démocratiques.
Ils sont fondés sur l’idée d’une souveraineté démocratique. La souveraineté trouve son origine dans le peuple ou la Nation. Le peuple ou la Nation exercent directement ou indirectement le pouvoir d’Etat. Ce postulat ou cette croyance permet de justifier que le pouvoir d’Etat soit soumis à un contrôle populaire (principe de l’alternance, recours à l’élection ou au référendum). Deux variantes l’une libérale, l’autre autoritaire ont été expérimentées dans le monde.
1 la démocratie libérale
Elle peut être soit directe (gouvernement direct dans certains cantons en Suisse), soit semi-directe (combinaison de représentation et du recours au référendum), soit représentative (sur le fondement de l’idée de souveraineté nationale). Dans le dernier cas, elle a recours à l’élection qui a lieu aujourd’hui au suffrage universel.
2 la démocratie dirigée
Un parti ou un homme prétend incarner le peuple et exprimer sa volonté. Dès lors le recours à l’élection devient facultatif ou est encadré (refus du multipartisme, du suffrage universel, utilisation du plébiscite). C’était le cas dans les démocraties populaires en Europe de l’Est soumises au monopole idéologique des partis communistes. On aboutit à des systèmes dits totalitaires.



§ 2. Les régimes


1. La notion de régime politique

A définition
Les régimes (forma regiminis) concernent le mode fondé sur la Constitution ou les usages politiques selon lequel l’Etat fait usage de son pouvoir (ou de la souveraineté sens n°2). La distinction entre Etats repose sur la réponse à la question : « COMMENT est gouverné un Etat ? ».
On peut distinguer régime constitutionnel et régime politique. Le premier se déduit uniquement de la Constitution ; le second se fonde aussi sur des usages politiques. Par exemple l’Angleterre a pour régime constitutionnel une monarchie traditionnelle et pour régime politique une monarchie parlementaire.
B le critère moderne de classification
À partir du 18e, on porte attention aux modalités de distribution du pouvoir d’Etat et moins au fait de savoir qui est le souverain. La théorie libérale de la séparation des pouvoirs notamment développée par Montesquieu dans L’esprit des lois (1748) sera la principale technique utilisée pour distribuer, partager le pouvoir d’Etat. Indépendamment de sa portée pratique (garantir la liberté politique), elle va donc permettre de classer les régimes en tenant compte de la manière dont ils appliquent ou refusent cette théorie.
Cette théorie a été appliquée de manière complémentaire selon deux plan : horizontal et vertical. Les européens ont plutôt développé et perfectionné au départ une séparation des pouvoirs horizontale qui permet de diviser le pouvoir d’Etat du gouvernement au sens large. Il appartient aux américains, inventeurs du fédéralisme d’avoir développé très tôt une séparation des pouvoirs verticale. Les européens ont attendu la fin du XIXème siècle pour admettre une timide décentralisation et aujourd’hui des formes de régionalisation très poussée.


2. La typologie des régimes politiques


A critère de la séparation des pouvoirs horizontale
On s’attachera ainsi à savoir si le pouvoir d’Etat gouvernemental est partagé ou non, si les organes exerçant ce pouvoir sont indépendants les uns de autres, etc. La théorie de la séparation des pouvoirs peut donc devenir un critère permettant de classer les régimes mais aussi de les hiérarchiser. À partir des idées de Montesquieu, on arrive à une typologie de base fort simple que les juristes constitutionnalistes ne cesseront de complexifier, d'adapter.
a) Typologie de base à partir de Montesquieu
1) Régimes de confusion des pouvoirs : tout le pouvoir d’Etat est exercé par un seul organe.
Si c'est le roi, il s'agit d'une monarchie absolutiste qui peut dériver en "Gouvernement despotique" car qui a du pouvoir aura tendance à en abuser. Il en est de même si c’est le peuple, la république populaire peut elle aussi devenir despotique.
2) Régimes de séparation des pouvoirs : l’exercice du pouvoir politique est partagé entre différents organes d’Etat. Les auteurs du 18e siècle distinguent entre régimes de séparation des pouvoirs selon l’identité du titulaire du pouvoir exécutif ; ce qui conduit à retrouver les termes utilisés pour classer les formes de gouvernement mais en leur donnant un nouveau sens. Ainsi l’aristocratie qui est le meilleur des régimes pour Rousseau est celui non pas où les aristocrates sont souverains mais où les aristocrates détiennent le pouvoir exécutif.
On peut remarquer qu’une autre distribution des régimes de séparation des pouvoirs peut être conçue en tenant compte des divergences entre Montesquieu et Rousseau. Pour le premier, cette séparation doit être faite avec souplesse (interaction entre les organes) et doit permettre aux différentes classes (ordres) de la société d’être représentées dans l’Etat ; ce qui aboutira à un"Gouvernement modéré". Montesquieu parle ainsi de « balance des pouvoirs », technique qui sera appliquée en France en 1791 et aux Etats-Unis dès 1787. Il s’oppose sur ce point à Rousseau qui conçoit la séparation des pouvoirs selon un principe de « spécialisation des organes » (application en 1793, pas d’interaction entre les organes).


b) Typologie contemporaine
Typologie utilisée aujourd'hui. Elle part toujours du critère de la séparation des pouvoirs et donc ne fait que complexifier la typologie à partir Montesquieu.


1) Les régimes de confusion des pouvoirs
On distingue entre régimes de confusion au profit :
- de l'Exécutif : on parlera de dictature ou encore de régime présidentialiste. Exemple : les régimes présidentialistes d'Afrique noire dont on ne finit pas d’annoncer la disparition.
- du Législatif : on parlera de régime d'Assemblée ou encore de régime conventionnel. Exemple : la Terreur en France.
- du Judiciaire : on parlera de Gouvernement des juges. Pas d'exemple connu ; tout au plus pourra-t-on parler de risque de Gouvernement des juges lorsque certaines cours suprêmes ou constitutionnelles s'opposent à certaines époques systématiquement aux pouvoirs législatif et exécutif pour des raisons moins de droit qu’idéologiques. (Cf. aux États-Unis pendant le New Deal sous le Président Roosevelt dans les années 3O).




2) Les régimes de séparation des pouvoirs
- Les régimes présidentiels :
Ce sont des régimes qui sont restés fidèles à Montesquieu ayant appliqué à la lettre (ou presque) sa théorie de la balance des pouvoirs : soit les États-Unis de 1787 et la France de 1791 et 1795. Cela se traduit par l'existence :
- d'une collaboration minimale des organes politiques
- de facultés d'empêcher entre ces organes politiques (par exemple le droit de veto au profit du chef de l'État).
Ces régimes ont eu en Europe, notamment en France une faible durée de vie. La raison essentielle tenant au fait qu'ils ne permettent pas de résoudre facilement les conflits qui peuvent surgir entre les organes politiques. Si ces organes ne peuvent en effet se révoquer (et permettre ainsi que joue l'arbitrage du peuple), Le risque est grand que des blocages apparaissent, que la Constitution ne soit plus respectée et finalement que le régime disparaisse dans un coup d'État au profit de l'un des organes. Exemple : le coup d'État de 1851 au profit de Louis Napoléon Bonaparte qui met fin au régime présidentiel organisé par la Constitution de 1848.
Par contre, aux États-Unis, le régime présidentiel s'est maintenu grâce notamment au développement de la collaboration entre le Président et le Congrès. Cependant, le président ne pouvant toujours pas dissoudre un Congrès qui lui-même ne peut mettre en jeu la responsabilité politique du Président, les conflits restent nombreux et font que le régime est souvent en crise. Malgré tout le régime présidentiel à l’américaine reste un modèle qui continue d’être attractif, notamment en France.


- Les régimes parlementaires :
Ce sont les régimes qui naturellement ont en Europe succédé aux régimes présidentiels. Ils ont adapté en la radicalisant la théorie de Montesquieu. Ce phénomène s'est produit surtout au XIXe siècle. Exemple : le régime parlementaire en France né de la pratique à partir de la Restauration (1815).
Ces régimes se définissent ainsi :
- collaboration très importante entre les organes
- présence de facultés de révoquer détenues par l'Exécutif et le Législatif : droit de dissolution (généralement aux mains du chef de Gouvernement), droit de renverser le Gouvernement (généralement aux mains de la première Chambre ; soit en France sous la Vè république, l'Assemblée Nationale). Les régimes parlementaires ont commencé par être dualistes pour devenir ensuite monistes. On appelle dualiste un régime parlementaire dans lequel le Gouvernement est responsable devant le Parlement mais aussi devant le Chef de l'État. On appelle moniste un régime parlementaire dans lequel le Gouvernement n'est responsable que devant le Parlement.
Les régimes parlementaires ont commencé par être dualistes du fait que le chef de l'État à l'origine possédait une forte légitimité et des compétences importantes qui faisaient de lui le véritable chef du Gouvernement. En conséquence, il pouvait exiger la démission de ministres en désaccord avec lui. Exemple : le régime parlementaire en France sous la Monarchie de Juillet de 1830 à 1848 dominé par le roi Louis-Philippe.
Presque tous les régimes de séparation des pouvoirs nouvellement créés au XXe siècle sont des régimes parlementaires de type moniste. Exemple : les régimes tchèques, polonais, hongrois nés après l'effondrement du communisme à l'Est. L'exception est le régime russe ; ce régime russe est un régime parlementaire en tant que la dissolution de la Douma d'État est prévue (au profit du Président) ainsi que la révocation du Gouvernement par la Douma à la suite d'un vote de défiance. Mais il se trouve que le Gouvernement est responsable aussi devant le Président. On peut donc parler de résurgence du régime parlementaire dualiste.

Les régimes parlementaires contemporains monistes ou dualistes peuvent être classés en deux autres types : majoritaires et non majoritaires
- Si les élections législatives conduisent à la victoire d'une coalition de partis peu nombreux, unis, disciplinés (obéissant aux consignes de leurs leaders), alors on parle alors de régimes parlementaires majoritaires. Ces régimes ont l'avantage d'être stables politiquement car le Parlement n'aura pas la possibilité politique de s'opposer au Gouvernement et de le renverser. Ces régimes ont un inconvénient. Ils connaissent en pratique une tendance à la confusion des pouvoirs au profit de l'Exécutif. On parlera de tendance présidentialiste. Exemple : l’Angleterre, la R.F.A., le Japon, la France de la Vème République.
- Si les élections législatives conduisent à la victoire d'une coalition de partis nombreux, non unis, indisciplinés (n'obéissant pas aux consignes de leurs leaders), alors on parle de régimes parlementaires non majoritaires. Ces régimes ont l'inconvénient d'être instables politiquement car le Parlement a la possibilité de s'opposer au Gouvernement et de le renverser (ce dont ils ne se prive pas). Dès lors, ils connaissent une tendance à la confusion des pouvoirs au profit du Parlement. On parle de dérive vers le Régime d'Assemblée. Exemple : l'Italie jusqu'en 1993, Israël, la France de la IVe République.
c) Critique de la classification moderne des régimes
1 critique scientifique
- catégories hétérogènes : on utilise en même temps des élements juridiques comme l’existence d’un droit de dissolution (ordre de ce qui doit être, textuel) et des élements politiques comme la présence d’une majorité stable au Parlement (ordre de ce qui est, de l’effectivité, pratique).
-catégories sans portée cognitive : les critères juridiques utilisés ne permettent pas déterminer la véritable nature d’un régime. Par exemple, il ne permettent pas de déterminer si un organe est réellement dominant (il peut être titulaire de droits qui ne se révélent pas être des pouvoirs) ou enore quelle est la nature réelle d’un régime (confusion ou non des pouvoirs)
2 critique philosophique
La classification contemporaine héritée largement de Montesquieu ne permet pas de rendre compte de régimes nouveaux de confusion des pouvoirs nés au 20e siècle : les régimes totalitaires ou de domination totale.
Ces régimes peuvent avoir une apparence constitutionnelle très classique : le régime nazi qui avait maintenu la Constitution de Weimar organisant un régime parlementaire ; le régime soviétique qui avait une Constitution organisant un régime de spécialisation des pouvoirs. Pourtant, en deçà du droit constitutionnel existait une autre organisation plus cachée mais effective du pouvoir réel au profit d’un leader et de son parti gouvernant par la terreur grâce à une police secrète.

B le critère de la séparation verticale du pouvoir
On s’attachera ici à déterminer dans quelle mesure le pouvoir central accepte l’autonomie de pouvoirs locaux. On distinguera principalement les Etats unitaires qui peuvent se décentraliser des Etats fédéraux. On terminera en décrivant la confédération qui n’est pas une forme d’Etat mais plutôt la manière habituelle des Etats de coopérer entre eux.
Nota : le critère de la séparation verticale du pouvoir est aussi retenu en droit international pour classifier les Etats.


a) l'État unitaire
C'est un État dans lequel l’exercice du pouvoir juridique d’État est monopolisé par un seul centre politique ou Gouvernement central. Corollaire : tous les individus sont soumis au même Gouvernement qui seul dispose d’un pouvoir normatif propre. Cela n’exclut pas que l’Etat unitaire admette en son sein l’existence de collectivités territoriales capables de créer leur propre droit (règlements, lois). Mais dans ce cas, les collectivités devront se soumettre à un droit commun minimal issu du gouvernement central. Cette forme d'organisation qui caractérise l'État français actuel et la majorité des États dans le monde est la plus ancienne. Historiquement, les premiers États occidentaux apparus au XIe, consolidés au XVIIe siècle étaient unitaires.
On distingue deux types d'États unitaires : centralisés et décentralisés. Cette distinction doit être relativisée en pratique. En effet, un Etat unitaire ne peut accepter une décentralisation complète sauf à disparaître, démembré en plusieurs Etats. Donc chaque Etat recherche un équilibre entre centralisation et décentralisation.
a) les États centralisés : État dans lequel le pouvoir juridique d’État est exercé seulement par des agents nommés et soumis à l’autorité hiérarchique du Gouvernement central. Ils n’ont donc aucun pouvoir juridique propre.
Un État centralisé est généralement déconcentré au sens où certains de ses agents bénéficiant de délégations pourront être délocalisés. Exemple : le Préfet en France. La concentration est donc un mode théorique d'organisation administrative.
b) les États décentralisés : État dans lequel le pouvoir juridique d’État est en partie confié aux individus eux-mêmes qui, à travers certaines institutions administratives généralement élues vont s’administrer avec un contrôle souple du Gouvernement central. Cette « libre administration » peut conduire lorsqu’elle est très poussée à permettre à ces institutions de disposer d’un pouvoir normatif (réglementaire, législatif…) autonome (Espagne, Italie) dans certains domaines. Mais ce pouvoir ne saurait être constituant ; donc permettre aux institutions décentralisées de définir leur propre statut.
Le principe de « libre administration » se manifeste par le fait que les institutions décentralisées ont :
la personnalité juridique (ce qui leur permet d'avoir leurs propres agents publics et ressources).
disposent d'une compétence spécialisée sous le contrôle de l'État : en France on distingue la tutelle (contrôle administratif exercé par le Préfet sur les personnes et les actes) du contrôle juridictionnel moins sévère (contrôle sur les actes, exercé par les préfets qui déférent ces actes devant les juridictions lorsqu'ils estiment qu'ils sont illégaux).

b) L’Etat fédéral
C’est un État dans lequel le gouvernement central confie l’exercice de certaines compétences à des entités (Républiques, Provinces...) qui vont se diriger elles-mêmes. Principe de « libre gouvernement ». Corollaire : les individus seront soumis à des normes fédérales communes (Constitution fédérale, lois fédérales...) et à des normes locales propres aux entités fédérées (Constitution, lois des entités fédérées). Le gouvernement central conserve en général des compétences dites « régaliennes » : droit de faire la guerre, droit d'avoir des représentations diplomatiques à l'étranger, droit de battre monnaie.

Nota : il est souvent difficile de distinguer entre un État fédéral et un État unitaire décentralisé. Cela parce qu'il n'y a pas de différence essentielle entre décentralisation gouvernementale et décentralisation administrative, État unitaire et État fédéral. En effet, en dernière analyse, la compétence des institutions décentralisées et des entités fédérées dépend dans les deux cas d'un ordre juridique supérieur et peut être modifiée par le pouvoir central. Il n'y a entre l'un et l'autre système qu'une "différence de degrés".