Dossier n°4 : la Constitution.

O. CAMY

 

Corrigé N°2

 

Sujet de dissertation :

Justification et limite du contrôle de constitutionnalité

 

 

Introduction :

• partir d’un fait d’actualité : l’apparition de Cours constitutionnelles dans les nouvelles démocraties en Europe de l’Est ou encore en Afrique de l’Ouest

commentez ce fait dans l’optique du sujet : tout se passe comme si l’Etat de droit inventé par le droit constitutionnel occidental classique ne pouvait aujourd’hui se penser et se pratiquer que comme « Etat de droit constitutionnel ». Mais est-ce une garantie réellement efficace ou l’effet d’une mode (d’une idéologie juridique) ?  

définitions :

contrôle de constitutionnalité : contrôle de conformité des actes de l’Exécutif et du Législatif par rapport à la Constitution pratiqué généralement par un juge ordinaire (voie d’exception) ou particulier (voie d’action), soit a priori, soit a posteriori

origine : 1803 EU (décision Marbury contre Madison), 1920 Autriche (rôle du juriste H. Kelsen).

problématique :

Ce contrôle repose sur un double postulat :

-        Le soupçon que les lois (ou encore les actes de l’Exécutif) peuvent être liberticides ou menacer la structure d’un régime ; ce qui les conduit à violer la Constitution (contenant l’énoncé des libertés fondamentales dans son Préambule en général et les principes directeurs de l’Etat).

-        La confiance dans le juge considéré comme impartial, a-politique et donc en mesure de s’opposer à la volonté des représentants pour des raisons de droit seulement.

Mais ce soupçon et cette confiance sont-ils justifiés ? Surtout, n’entraînent-ils pas à travers la mise en place d’un contrôle constitutionnalité une négation de la volonté du peuple (assimilée à celle de ses représentants) ? La Constitution ne fait-elle pas l’objet d’une sacralisation ? Pourquoi la volonté ancienne du peuple (1789-1958) devrait-elle toujours s’imposer à la volonté présente du peuple ?

 

• Phrase-plan : elle doit obligatoirement contenir une réponse argumentée et nuancée à la question posée. Ce qui importe n’est pas tant le choix de la réponse que de faire la preuve que vous être capable de justifier votre propos de manière claire et rigoureuse. 

Solution proposée : Le contrôle de  constitutionnalité repose sur une justification aporétique (ou problématique) et rencontre des limites tant d’un point de vue pratique que théorique.

 

Plan :

 

I Une justification aporétique (ou problématique) …

Deux difficultés :

A le soupçon envers la loi parlementaire :

Cela revient à ne pas prendre au sérieux la confiance révolutionnaire envers la loi et à oublier les actes de l’Exécutif.

a)     La confiance révolutionnaire envers la loi

-        Les révolutionnaires avaient confiance en la loi en tant qu’elle exprimait la volonté du souverain (le peuple) et qu’elle était guidée par l’Intérêt général (Rousseau).

-        Plutôt que de rechercher à s’opposer à la loi, ne faudrait-il pas la restaurer ? (Renforcement des Parlements, amélioration de leur travail)

 

 

 

 

b)     L’oubli des actes de l’Exécutif

-        Le contrôle de constitutionnalité ne concerne généralement pas en Europe (cf. art. 61 de la Constitution française) les actes de l’Exécutif ; cela à l’opposé des EU. Pourquoi un tel privilège ? 

-        Les actes de l’Exécutif peuvent encore plus menacer les libertés que ceux des Parlements contemporains affaiblis par le fait majoritaire.

 

B Limiter la volonté populaire au nom du Peuple 

a)     Paradoxe logique 

-        On prétend opposer la volonté du peuple avec elle–même en donnant toujours la préférence à sa manifestation la plus ancienne (par exemple la DHHC de 1789)

 

b)     Paradoxe politique

-        Pourquoi la manifestation la plus ancienne de la volonté du peuple contenue dans la Constitution doit s’imposer à la manifestation présente qui peut être plus progressiste ou adaptée aux évolutions récentes ?

-        N’est-ce pas organiser une nouvelle « aliénation » ?

 

 

II … des limites tant d’un point de vue pratique que théorique.

 

A d’un point de vue pratique

a)     Le contrôle peut être contourné

-        caractère non systématique des contrôles a priori ou  a posteriori

-        possibilité d’absence de recours (notamment si entente des organes constitutionnels : cas de la France avant la réforme de la saisine du Conseil constitutionnel de 1974 cf. l’exception de 1971).

 

b)     Le contrôle peut se politiser

-        à travers une interprétation ou une actualisation du sens de textes anciens et flous (cf. préambule de 1946)

-        à travers la nomination des juges qui est politique en France et aux EU (rôle du chef de l’Etat par exemple).

 

B d’un point de vue théorique

a)     Le risque de sacralisation des Constitutions

-        Passage à une super rigidité : pour éviter le contournement du contrôle par des révisions de la Constitution. Exemple de la décision Maëstricht II Considérant 19 (France) et de la notion de « basic structure » (Inde) : principe d’un contrôle de constitutionnalité des révisions de la Constitution  

-        Idée religieuse d’un noyau intangible. Mais la Constitution peut-elle prétendre être un dogme invariable, soustrait à la volonté populaire comme la Bible ou le Coran ?

 

b)     La théorie de la souveraineté

-        La notion contemporaine de la souveraineté détruit logiquement l’obstacle du contrôle de constitutionnalité : le peuple souverain peut toujours modifier la Constitution ou les procédures de révision de la Constitution (Ce qu’admet implicitement le Conseil constitutionnel dans sa décision de 1962 où il refuse de contrôler les lois référendaires).

-        Vers l’abandon de la notion contemporaine de souveraineté ?