LES DOCUMENTS DE TRAVAIL DU SÉNAT
Série LÉGISLATION COMPARÉE
LE PORT DU FOULARD ISLAMIQUE À LÉCOLE
n° LC 128 Novembre 2003- 3 -
LE PORT DU FOULARD ISLAMIQUE À LÉCOLE
Sommaire
Pages
NOTE DE SYNTHÈSE.........................................................................
5
DISPOSITIONS NATIONALES
Allemagne ....................................................................................
7
Belgique (Communauté française) ............................................
9
Danemark.....................................................................................
13
Espagne.........................................................................................
15
Grande-Bretagne..........................................................................
17
Pays-Bas.......................................................................................
19
LISTE DES PRINCIPAUX TEXTES ANALYSÉS............................. 21
LE PORT DU FOULARD ISLAMIQUE À LÉCOLE
La laïcité de lécole publique, la faible autonomie
des établissements
scolaires et la traditionnelle volonté de reconnaître des droits
aux individus plutôt
quaux groupes ou aux minorités donnent au débat français
sur le port du foulard
islamique à lécole un relief particulier.
Il nest toutefois pas inutile dexaminer dans quelle mesure les autres
pays européens autorisent les élèves de confession musulmane
à porter le foulard à
lintérieur des établissements denseignement public.
Lanalyse de la situation en Allemagne, en Belgique (communauté
française), au Danemark, en Espagne, en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas
montre
que :
cest dans la communauté française de Belgique que
les litiges relatifs
au port du foulard par des élèves de confession musulmane ont
été
proportionnellement les plus nombreux ;
les revendications de certaines jeunes musulmanes ont récemment
conduit le ministre néerlandais de lÉducation à rappeler
aux établissements
scolaires les principes applicables.
1) Cest dans la communauté française de Belgique que les
litiges relatifs
au port du foulard par des élèves de confession musulmane ont
été
proportionnellement les plus nombreux
a) En Allemagne, au Danemark, en Espagne, en Grande-Bretagne et
aux Pays-Bas, le port du foulard islamique dans les établissements scolaires
a
donné lieu à un petit nombre de procédures administratives
ou judiciaires
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Dans ces cinq pays, le port du port du foulard islamique par des élèves
de confession musulmane est généralement admis, notamment dans
les
établissements publics.
Cette attitude est motivée en Allemagne par le respect de la liberté
de
croyance, au Danemark, en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas par la volonté
de ne
pas prendre de mesures discriminatoires, et en Espagne par le souci dassurer
avant
tout la scolarisation des élèves dorigine étrangère.
b) Dans la communauté française de Belgique, où les conflits
sont
plus nombreux, le débat nest pas clos
Jusquà maintenant, le principe de neutralité de lenseignement
public a
été appliqué avec une souplesse telle que la plupart des
conflits ont pu être réglés à
lamiable.
Dans les affaires dont ils ont été saisis, les tribunaux ont toujours
fait
prévaloir les principes dégalité et de neutralité
de lenseignement public sur la
liberté religieuse et donné tort aux plaignantes et à leurs
familles.
Le port de « tenues complètes » de la part de certaines élèves
a conduit
le ministre de lÉducation à sexprimer en janvier 2002
pour linterdiction du
voile. Quelques semaines plus tard, le gouvernement adoptait, à linitiative
du
Ministre-président, une position favorable au foulard. Le texte publié
précise que
le port du foulard ne doit ni présenter un caractère prosélyte
ni empêcher le
respect des principes essentiels, comme la mixité. Le débat nest
cependant pas
clos, car la section administrative du Conseil dÉtat, consultée
par le
Ministre-président, a décliné sa compétence, au
motif, dune part, que la question
était « potentiellement litigieuse » et, dautre part,
que la section de législation
pouvait être amenée à se prononcer sur la question.
2) Les revendications de certaines jeunes musulmanes ont récemment
conduit le ministre néerlandais de lÉducation à rappeler
aux établissements
scolaires les principes applicables
Le port du simple foulard est accepté aux Pays-Bas, où les
discriminations religieuses sont prohibées par la loi. Cependant, les
revendications
de certaines élèves, désireuses de porter des voiles couvrant
la totalité du visage,
ont récemment conduit le ministre de lÉducation à
prendre position.
En juin 2003, il a rappelé aux établissements scolaires que leurs
prescriptions vestimentaires ne devaient pas être discriminatoires, notamment
sur
le plan religieux. Aucun règlement intérieur ne peut donc prévoir
linterdiction
générale du foulard.
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En même temps, le ministre a précisé que le caractère
discriminatoire
dune prescription vestimentaire était justifié lorsquil
reposait sur des
considérations objectives, comme par la nécessité didentifier
les élèves.
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LE PORT DU FOULARD ISLAMIQUE À LÉCOLE
ALLEMAGNE
Considéré comme une manifestation de la liberté de croyance,
garantie par la Loi fondamentale, le port du foulard islamique par les élèves
de
confession musulmane est admis.
Le débat se concentre depuis quelques années sur le port du foulard
islamique par les enseignantes, et la Cour constitutionnelle a, le 24 septembre
2003, dans une affaire opposant lune delles au Land de Bade-Wurtemberg,
indiqué que labsence dinterdiction législative explicite
permettait le port du
foulard.
Les procédures administratives ou judiciaires relatives au port du
foulard islamique par les élèves sont rares. En août 1993,
contredisant les
juridictions inférieures, le Tribunal administratif fédéral
a accepté la demande dune
collégienne de treize ans de confession islamique dêtre dispensée
des cours
déducation physique, qui étaient mixtes.
Le Tribunal administratif fédéral a donné tort à
la cour dappel et au tribunal de première
instance. Ces derniers avaient rejeté la demande de la jeune fille, sauf
pour les séances de
natation, estimant quaucun motif exceptionnel particulier ne justifiait
quelle ne se
conformât pas à lobligation scolaire. Selon la cour dappel,
le problème qui se posait à la
collégienne pouvait être aisément résolu par le port
de vêtements amples et adaptés à la
pratique du sport.
Le Tribunal administratif fédéral a estimé quimposer
de revêtir des vêtements amples pour
suivre les cours déducation physique constituait une mise à
lécart injustifiée et quil était
donc fondé de la dispenser de suivre ces cours, si ceux-ci ne pouvaient
pas être assurés
séparément pour les garçons et pour les filles.
En revanche, dans un conflit opposant Mme Ludin, enseignante
dorigine afghane, au Land de Bade-Wurtemberg, le Tribunal administratif
fédéral
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avait confirmé en juillet 2002 linterdiction du port du foulard
islamique, en vertu
du principe de neutralité de lécole publique.
Dans la décision quelle a rendue le 24 septembre 2003, la Cour
constitutionnelle fédérale a estimé que le port du foulard
par une enseignante nétait
que potentiellement dangereux pour la neutralité de lécole
et que seul le
législateur démocratiquement élu pouvait interdire le port
du foulard par les
enseignantes, en tenant compte des facteurs locaux (composition de la population,
traditions religieuses
). En labsence dinterdiction dans le
Land de Bade-
Wurtemberg, les autorités éducatives navaient donc pas de
raison de refuser un
poste à Mme Ludin.
Les ministres de lÉducation des Länder, réunis les
10 et 11 octobre
2003, divergent sur les conclusions à tirer de la décision de
la Cour
constitutionnelle. Sept dentre eux (Bade-Wurtemberg, Basse-Saxe, Bavière,
Berlin, Brandebourg, Hesse et Sarre) ont annoncé leur intention de légiférer
pour
interdire aux enseignantes le port du foulard. Le Land de Brême est encore
indécis
et les autres considèrent quil nest pas nécessaire
dintervenir.
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LE PORT DU FOULARD ISLAMIQUE À LÉCOLE
BELGIQUE (Communauté française)
Lenseignement fait partie des compétences des trois communautés
française, flamande et germanophone.
Dans la communauté française, le port du foulard nest encadré
par
aucune norme. Cependant, le décret du 31 mars 1994 énonce lobligation
de
neutralité de lenseignement. Par ailleurs, les établissements
scolaires, même
publics, sont libres dédicter des prescriptions vestimentaires
dans leur
règlement intérieur.
Les conflits relatifs au port du foulard islamique sont généralement
réglés localement, au sein des établissements ou par le
conseiller municipal
chargé des questions scolaires. Toutefois, plusieurs affaires ont été
portées
devant les tribunaux depuis la fin des années 80 : jusquà
maintenant, les décisions
prises par la justice ont toutes été défavorables aux plaignantes
et à leur famille.
Conformément à larticle 24 de la Constitution, qui dispose
que « la
communauté organise un enseignement qui est neutre », le décret
du 31 mars
1994 définissant la neutralité dans lenseignement public
subordonne lexercice de la
liberté religieuse au respect dautres principes généraux.
Il énonce ainsi à
larticle 3 :
« Les élèves y sont entraînés graduellement
à la recherche
personnelle ; ils sont motivés à développer leurs connaissances
raisonnées et
objectives et à exercer leur esprit critique.
» Lécole de la Communauté garantit à lélève
ou à létudiant, eu
égard à son degré de maturité, le droit dexprimer
librement son opinion sur
toute question dintérêt scolaire ou relative aux droits de
lhomme.
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» Ce droit comprend la liberté de rechercher, de recevoir et de
répandre des informations et des idées par tout moyen du choix
de lélève et de
létudiant, à la seule condition que soient sauvegardés
les droits de lhomme, la
réputation dautrui, la sécurité nationale, lordre
public, la santé et la moralité
publiques, et que soit respecté le règlement intérieur
de létablissement.
» La liberté de manifester sa religion ou ses convictions et la
liberté
dassociation et de réunion sont soumises aux mêmes conditions.
»
Par ailleurs, le décret du 24 juillet 1997 définissant les missions
prioritaires de lenseignement public consacre le principe dégalité.
Il affirme
notamment qu« assurer à tous les élèves des
chances égales démancipation
sociale » constitue un objectif de lenseignement et que, pour que
cet objectif
puisse être atteint, chaque élève a « lobligation
de participer à toutes les
activités liées à la certification organisée par
létablissement et daccomplir les
tâches qui en découlent », ce qui exclut par exemple que
des jeunes filles qui
portent le foulard soient dispensées des cours déducation
physique.
Même si les règlements de certains établissements scolaires
(1)
interdisent le port de tout couvre-chef, jusquà présent,
le port du foulard islamique
dans les écoles a suscité peu de procédures judiciaires,
car les principes de
neutralité et dégalité font lobjet dune
application particulièrement souple : des
compromis sont donc négociés entre les établissements scolaires
et les familles,
par exemple pour ninterdire le foulard que pendant certaines activités
(travaux
pratiques de chimie ou gymnastique).
Plusieurs affaires ont cependant été portées devant les
tribunaux, qui se
sont fondés sur les deux décrets susmentionnés pour dénier
aux jeunes filles de
confession musulmane le droit de déroger au règlement intérieur
de leur
établissement et de porter le foulard.
Ainsi, le tribunal de grande instance de Bruxelles sest prononcé
le
11 décembre 1997 contre la réintégration de six jeunes
filles dans leur école, dont
le règlement interdisait le port de signes distinctifs. Le règlement
précisait
« Porter un signe distinctif (vestimentaire ou emblématique) est
déjà donner [...]
un message porteur de certaines valeurs, ce qui est tout à fait contraire
à la
déontologie [...] ». Le tribunal a alors affirmé : «
dans notre État de droit, qui
nest pas théocratique mais dinspiration pluraliste, ces textes
coraniques et
paroles prophétiques, pas plus que la bible, lévangile ou
autres textes
religieux, ne constituent une règle de droit à laquelle les organes
de lÉtat
seraient soumis. »
Dans une affaire similaire, la cour dappel de Liège avait, le 23
février
1995, déclaré : « il convient de rappeler quil a déjà
été jugé que linterdiction
(1) Cest le cas denviron 80 % des établissements publics
à Bruxelles.
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du port dinsignes manifestant une opinion politique, religieuse ou
philosophique nétait pas manifestement contraire à la liberté
de conscience et
de culte garantie aux étudiants, lorsque ceci est appliqué sans
discrimination et
repose sur des considérations objectives. »
Il convient de souligner que ces décisions ont été rendues
en référé et
que la Cour de cassation na pas eu loccasion de se prononcer.
Indépendamment de tout incident particulier, mais face au
développement, dune part, du port du foulard sur les lieux de travail
et, dautre
part, de « tenues complètes » de la part délèves
de confession musulmane, une
polémique a opposé au début de lannée 2002
le ministre de lÉducation et le
Ministre-président de la communauté française.
Le premier sétait exprimé en janvier 2002 pour linterdiction
du port
du foulard. En mai 2002, à linitiative du second, le gouvernement
de la
communauté adoptait une position commune favorable au foulard. Le communiqué
de presse publié le 16 mai 2002 énonçait : « Il est
important que, dans une
démocratie pluraliste, toutes les religions et signes religieux distinctifs
soient
traités sur un même plan au sein de lécole. Des manifestations
de tels signes
doivent donc être acceptées tant quelles ne sont pas assimilables
à du
prosélytisme, ne résultent pas du fruit dune pression subie
en ce sens par les
intéressées et ne se heurtent pas à des principes essentiels
tels que la mixité des
cours. »
Le même texte précisait que le port du foulard devait être
interdit
pendant les cours déducation physique et sur les photographies
des documents
didentité scolaires.
A la suite de cette polémique, le Ministre-président a, le 30
mai 2002,
sollicité lavis du Conseil dÉtat et du Centre pour
légalité des chances.
Le Conseil dÉtat a décliné sa compétence,
mais sest référé à larrêt
précité de la cour dappel de Liège du 23 février
1995 et à celui de la Cour
européenne des droits de lhomme du 15 février 2001 (2),
qui nient la légitimité du
port du foulard dans les établissements publics denseignement.
Quant au Centre
pour légalité des chances (3), il a, en septembre 2002,
rendu un avis motivé dans
lequel il ne se montre pas favorable à une interdiction de principe du
port de signes
à connotation religieuse ou philosophique. Il estime que la solution
aux conflits ne
peut être trouvée dans le droit, mais que chaque cas doit être
examiné séparément
et en dehors de tout climat passionnel.
(2) Arrêt rendu dans laffaire Mme Dahlab c/ Suisse, après
que le Tribunal fédéral eut interdit à Mme
Dahlab, institutrice dans lenseignement public, de porter le foulard islamique
en classe.
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(3) Personne morale de droit public créée par la loi en 1993,
le Centre pour légalité des chances et la
lutte contre le racisme a pour mission la lutte contre toute forme de discrimination.
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LE PORT DU FOULARD ISLAMIQUE À LÉCOLE
DANEMARK
Le port du foulard islamique dans les établissements denseignement
est admis.
En labsence de règles spécifiques, cest le principe
général
dinterdiction de toute discrimination religieuse, raciale, nationale ou
ethnique qui
sapplique.
La traditionnelle tolérance des sociétés scandinaves prévaut
donc,
notamment dans le milieu scolaire, et les dispositions qui interdisent toute
discrimination sy appliquent par analogie, les éventuels conflits
étant résolus au
niveau local.
La loi du 12 juin 1996 portant interdiction de toute discrimination sur le
marché du travail interdit notamment toute différence de traitement
fondée sur un
critère religieux, tel que le port du foulard. En août 2000, ce
texte a été utilisé pour
la première fois dans une affaire relative au foulard islamique : la
cour dappel de
Copenhague a condamné un grand magasin dOdense qui, deux ans auparavant,
avait
renvoyé une jeune stagiaire de quinze ans qui refusait denlever
son foulard.
Lemployeur a été condamné au versement de dommages
et intérêts dun montant
de 10 000 couronnes (cest-à-dire environ 1 350 €) et au paiement
des frais de
procédure à hauteur de 25 000 couronnes (environ 3 500 €).
Daprès le tribunal, les prescriptions vestimentaires du magasin
constituaient une forme de discrimination indirecte envers toutes les femmes
de
confession musulmane. Du reste, le programme du gouvernement pour une
meilleure intégration des minorités étrangères,
publié en 2003, aborde la question
du foulard et affirme que, à moins de raisons liées à la
sécurité ou à lhygiène, rien
ne soppose à ce quune femme porte un foulard sur son lieu
de travail.
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La société danoise dans son ensemble accepte le port du foulard,
comme
en témoigne une étude menée en 2001 par le cabinet de consultants
PLS
RAMBOLL. Daprès cette étude, seulement :
17 % des personnes interrogées portaient un jugement négatif
sur le
fait quune collègue porte un foulard ;
24 % déclaraient ne pas apprécier dêtre soignées
par une infirmière
portant un foulard ;
23 % faisaient la même observation pour une vendeuse.
Le plus fort pourcentage de personnes hostiles au foulard se trouvait
parmi les électeurs du Dansk Folkeparti (parti du peuple, de tendance
populiste).
La députée Louis Frevert, responsable pour les questions déducation
du
Dansk Folkeparti, a annoncé pendant lété 2003 lintention
de son groupe
politique de déposer une proposition de loi tendant à interdire
le port de « couvrechefs
à connotation culturelle » à lécole.
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LE PORT DU FOULARD ISLAMIQUE À LÉCOLE
ESPAGNE
Lenseignement relève de la compétence des communautés
autonomes et, dans la plupart dentre elles, le port du foulard dans les
établissements publics denseignement sest développé
sans quaucun débat ait
lieu.
En labsence de règles spécifiques et compte tenu, dune
part, de la
compétence des communautés autonomes en matière déducation
et, dautre
part, de la relative indépendance des établissements scolaires,
les conflits sont
réglés localement, en donnant la priorité à la scolarisation
des enfants.
La loi organique du 23 décembre 2002 relative à la qualité
de léducation,
dont les dispositions simposent aux législateurs des communautés
autonomes, fait
du « respect de la liberté de conscience et des convictions religieuses
et
morales » un devoir des élèves, au même titre que
le travail scolaire.
Par ailleurs, dans son article consacré à lintégration
dans le système
éducatif, elle énonce que « les administrations chargées
des questions
déducation favorisent lintégration des élèves
provenant de pays étrangers
dans le système éducatif » et que « les élèves
étrangers ont les mêmes droits et
devoirs que les élèves espagnols. Leur intégration dans
le système éducatif
suppose lacceptation des règles de caractère général,
ainsi que celles des
établissements quils fréquentent. »
Deux décrets royaux du 26 janvier 1996, applicables par défaut
dans
lenseignement primaire et secondaire en labsence de mesures prises
par les
communautés autonomes, accordent aux conseils détablissement
la compétence
pour adopter le règlement intérieur, qui peut notamment comporter
des
dispositions sur la tenue vestimentaire.
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Dans lensemble, le port du foulard est accepté par les établissements
scolaires. Toutefois, certains conflits ont eu lieu, notamment dans le cas denfants
contraints (4) de sinscrire dans un établissement privé.
En effet, même soutenus
par des fonds publics, les établissements privés peuvent, à
la différence des
établissements publics, imposer un uniforme à leurs élèves.
Jusquà maintenant, les conflits de ce type se sont peu ou prou
transformés en débat sur le rôle respectif des établissements
publics et privés dans
le système éducatif, puisque les autorités éducatives
locales ont toujours pris la
décision dintégrer les élèves concernées
dans des établissements publics.
Le dernier conflit important remonte à février 2002. Il concernait
une
jeune Marocaine de treize ans : létablissement catholique de la
banlieue de Madrid
qui devait laccueillir lui ayant refusé le port du foulard, elle
a finalement été
dirigée vers un établissement public. Le ministre régional
de lÉducation a fondé sa
décision sur deux arguments : lexistence, dans la communauté
autonome de
Madrid, détablissements scolaires autorisant le port du foulard
et labsence
dinterdiction explicite.
Lincident a suscité une polémique entre les responsables
locaux de
léducation, partisans de la priorité à la scolarisation
obligatoire, et plusieurs
personnalités nationales, parmi lesquelles les ministres de lÉducation
et du
Travail, ainsi que le Défenseur du peuple (équivalent du Médiateur
de la République
en France). La ministre de lÉducation sest exprimée
contre le port du foulard à
lécole au motif que lassimilation des étrangers passait
par lacceptation des
valeurs de la société espagnole, et le ministre du Travail a comparé
le port du
foulard à lexcision. Le Défenseur du peuple a, quant à
lui, souligné que de telles
manifestations culturelles et religieuses « romp[ai]ent les critères
égalitaires qui
doivent simposer dans la société espagnole ».
Bien que les responsables éducatifs locaux aient, à plusieurs
reprises,
souligné que lexistence de dispositions nationales sur la tenue
vestimentaire leur
permettrait de résoudre plus facilement les conflits, le ministère
national de
lÉducation nentend pas édicter de telles règles
pour le moment.
(4) Il sagit notamment des enfants qui déménagent pendant
lannée scolaire et auxquels la commission
locale pour la scolarisation indique les établissements comportant des
places disponibles.
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LE PORT DU FOULARD ISLAMIQUE À LÉCOLE
GRANDE-BRETAGNE
Le port du foulard est admis dans la plupart des établissements
denseignement.
La Commission pour légalité raciale et le ministère
de lÉducation
considèrent que linterdiction du port du foulard constituerait
une discrimination
injustifiée.
Bien que la plupart des écoles imposent un uniforme, le port du foulard,
dans la mesure où il est de la même couleur que les autres vêtements,
est accepté.
Dans les régions où de fortes minorités musulmanes sont
implantées, le
phénomène du foulard islamique a même été
pris en compte par les règlements des
établissements. Des conflits ont cependant parfois lieu, par exemple
lorsquune
jeune fille se présente avec la tête couverte dun foulard
ne correspondant pas au
modèle prévu par le règlement de lécole.
Le ministère de lÉducation, dans ses instructions relatives
à luniforme,
précise que les établissements scolaires doivent être «
sensibles aux besoins des
différentes cultures, races et religions » et quils doivent
notamment accepter les
tenues islamiques ainsi que les turbans des jeunes sikhs.
La Commission pour légalité raciale est linstance
chargée de veiller au
respect de la loi de 1976 qui interdit les discriminations fondées sur
la race, sur la
nationalité, ou sur lorigine ethnique ou nationale. Les questions
religieuses ne
font donc en principe pas partie de ses attributions. Elle a eu toutefois loccasion
de
sexprimer sur le port du foulard islamique à lécole
dès la fin des années 80. Elle a
alors estimé que linterdiction du foulard constituait une discrimination
raciale
indirecte, car une telle mesure affecte « de façon disproportionnée
» la population
originaire du sous-continent indien. Depuis lors, son code de bonne conduite
pour
lélimination de la discrimination raciale à lécole
dispose que toute prescription
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vestimentaire qui entraîne la mise à lécart dun
élève pour des raisons religieuses
ou culturelles est discriminatoire. Ceci exclut par exemple les règlements
imposant le port de jupes dans une école fréquentée par
des jeunes filles souhaitant
adopter la tenue islamique.
Il convient de souligner que les avis de la Commission pour légalité
raciale ne constituent que des recommandations. En labsence de tout texte
interdisant les discriminations fondées sur le critère religieux,
les tribunaux
pourraient prendre des décisions contraires.
En effet, en 1983, dans laffaire Mandla c. Dowell Lee, la Chambre des
Lords sétait appuyée sur la loi de 1976 sur les discriminations
raciales pour
résoudre un problème comparable à celui du foulard islamique.
Toutefois, il est
admis que cette jurisprudence ne sapplique pas au cas des musulmans, à
cause de la
trop grande hétérogénéité de la communauté
quils constituent.
Dans laffaire Mandla c. Dowell Lee en 1983, la Chambre des Lords a donné
raison à la famille
dun enfant sikh qui refusait de porter la casquette de luniforme
de son école et portait le
turban afin de se conformer aux prescriptions de sa religion. Le directeur de
lécole avait
refusé laccès à lenfant en avançant
que le fait de porter un turban constituait une
manifestation des origines ethniques et risquait donc daccentuer les distinctions
religieuses et sociales.
La Chambre des Lords a décidé que le refus du directeur constituait
une discrimination
illégale car les obligations relatives à luniforme étaient
telles que certains groupes raciaux
comme les Sikhs pouvaient sy conformer moins facilement que dautres.
Ce faisant, elle
assimile donc la discrimination contre le groupe religieux constitué
par les Sikhs à une
discrimination raciale. Bien que les Sikhs ne puissent pas être considérés
comme un
« groupe racial » dans lacception commune, la Chambre des
Lords élargit le sens de
lexpression. Pour constituer un tel groupe, il suffit quune communauté
sidentifie par :
une longue histoire commune ;
une tradition culturelle ;
une origine géographique commune ;
une langue commune ;
une littérature commune ;
une religion commune ;
le fait de constituer une minorité.
La Chambre des Lords considère les deux premiers critères comme
essentiels, à la différence
des cinq autres, quelle juge seulement pertinents.
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LE PORT DU FOULARD ISLAMIQUE À LÉCOLE
PAYS-BAS
Le port du foulard est admis, aussi bien dans les établissements
scolaires que sur les lieux de travail.
Cependant, devant la multiplication des incidents liés au port de voiles
masquant le visage, le ministre de lÉducation a rappelé
en juin 2003 aux
établissements scolaires les principes applicables (document n° 1)
en matière de
tenue vestimentaire.
La loi de 1994 sur légalité de traitement interdit plusieurs
formes de
discrimination, parmi lesquelles les discriminations religieuses. La loi sapplique
à
tous les domaines de la vie sociale, et notamment à lenseignement.
Sappuyant sur lavis donné le 20 mars 2003 par la Commission
pour
légalité de traitement (5) (document n° 2) dans une
affaire opposant un
établissement denseignement professionnel et plusieurs élèves
portant un voile
couvrant la totalité du visage, le ministre précise aux établissements
scolaires publics
quils sont libres dédicter des prescriptions vestimentaires
auxquelles les élèves
sont tenus de se conformer, pour autant :
que ces prescriptions ne soient pas discriminatoires ;
quelles ne portent pas atteinte à la liberté dexpression
;
quelles soient explicitement exposées dans le règlement
de
létablissement ;
(5) Instituée par la loi de 1994 sur le légalité
de traitement, la commission enquête sur les affaires de
discrimination. Ses conclusions nont aucune force exécutoire, mais
elles sont généralement suivies.
Voir létude de législation comparée LC 82 sur la
lutte contre les discriminations sur les lieux de
travail.
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que les sanctions prévues ne soient pas disproportionnées.
Le caractère non discriminatoire des prescriptions vestimentaires doit
notamment être apprécié sur le plan religieux, de sorte
que linterdiction générale
du port de la kippa, dun turban ou dun foulard est exclue, que linterdiction
vise
les élèves ou les professeurs.
Toutefois, conformément à lavis de la Commission pour légalité
de
traitement, le caractère discriminatoire dune prescription peut
avoir une
« justification objective » si trois critères sont remplis
:
légitimité du but recherché par la prescription
;
adéquation de la prescription à ce but ;
nécessité de la prescription, faute dautre solution.
Dans laffaire évoquée plus haut, la commission a estimé
que le but
recherché par linterdiction était légitime (puisque
la direction de létablissement
mettait en avant le besoin de communication réciproque, la nécessité
didentifier
les élèves et la plus grande facilité à suivre les
stages, nécessaires à lobtention du
diplôme final), que linterdiction permettait datteindre ce
but et quaucune autre
solution nétait possible.
Dans sa note, le ministre rappelle lentière liberté des
établissements
scolaires privés en matière de prescriptions vestimentaires. Du
reste, la
Commission pour légalité de traitement saisie par une jeune
fille à qui la direction
dun établissement denseignement catholique refusait le port
du foulard a, en août
2003, conclu quun tel refus nétait pas contradictoire avec
la loi de 1994 sur
légalité de traitement.
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LE PORT DU FOULARD ISLAMIQUE À LÉCOLE
LISTE DES PRINCIPAUX TEXTES ANALYSÉS
Document n° 1 Pays-Bas Consignes émises en juin 2003 par le
ministre de
lÉducation sur la tenue vestimentaire des écoliers (langue
originale)
Document n° 2 Pays-Bas Conclusions émises le 20 mars 2003
par la
Commission pour légalité de traitement sur le port du tchador
par des élèves de lenseignement professionnel (langue
originale).