La Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
C'est le 4 novembre 1950 qu'est signée à Rome la Convention européenne
de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Élaborée au sein du Conseil de l'Europe, elle a pour objet de définir
un certain nombre de droits fondamentaux et d'instituer un mécanisme de
contrôle et de sanction propre à assurer le respect de ces droits par
les États signataires. Les droits garantis sont définis par la
Convention elle-même, complétée par des protocoles additionnels.
L'ensemble combine des droits proprement dits et des libertés pour les
individus, et des interdictions et des obligations pour les États
signataires :
– Droit à la vie, à la liberté, à la sûreté ; droit à une bonne
administration de la justice ; droit au respect de la vie privée et
familiale, du domicile et de la correspondance.
– Liberté de pensée, de conscience et de religion ; liberté
d'expression et d'opinion, comprenant le droit de recevoir et de
communiquer des informations ; liberté de réunion pacifique et
d'association.
– Droit de se marier et de fonder une famille.
– Interdiction de la torture, des peines ou traitements inhumains ou
dégradants, de l'esclavage, de la servitude, du travail forcé et
obligatoire.
– Interdiction de la rétroactivité des lois pénales.
– Interdiction de la discrimination dans la jouissance des droits et libertés garantis.
– Droit au respect des biens ; droit à l'instruction ; obligation faite
aux États d'organiser, à intervalles raisonnables, des élections libres
au scrutin secret.
– Droit de circuler librement et de choisir sa résidence ; droit de quitter un pays.
– Interdiction de mesures privatives de liberté pour manquement à une
obligation contractuelle ; interdiction de mesures individuelles ou
collectives d'expulsion dirigées par un État contre ses propres
ressortissants, comme des expulsions collectives d'étrangers ; droit
pour les étrangers expulsés à des garanties procédurales ; droit d'un
condamné au recours devant une juridiction supérieure ; droit à ne pas
être poursuivi en raison d'une infraction pour laquelle on a déjà été
jugé ; égalité des droits et des responsabilités des époux dans le
mariage.
Le contrôle de l'application de la Convention est confié à trois
organes : la Commission européenne des droits de l'homme, la Cour
européenne des droits de l'homme, le Comité des ministres du Conseil de
l'Europe. La Commission est composée de personnes (un membre par État)
siégeant à titre personnel et élues pour six ans par le Comité des
ministres sur une liste dressée par le bureau de l'assemblée
consultative. Elle peut être saisie soit par un État « de tout
manquement aux dispositions de la présente Convention qu'il croira
pouvoir être imputé à une autre partie contractante » (art. 24), soit,
si l'État incriminé a fait une déclaration en ce sens, par la requête
d'un particulier, d'un groupe de particuliers ou d'une organisation non
gouvernementale (art. 25). Après avoir examiné la recevabilité de la
requête, la Commission établit les faits et recherche un règlement
amiable. En cas de règlement amiable, la Commission établit un rapport
qui est transmis aux États intéressés, au Comité des ministres et au
secrétaire général du Conseil de l'Europe pour publication. En
l'absence de règlement amiable, la Commission rédige à l'attention du
Comité un rapport exposant les faits et exprimant son avis sur le point
de savoir s'il y a ou non violation de la Convention.
Si la Commission en décide ainsi et si l'État mis en cause a accepté la
juridiction de la Cour européenne (art. 48), celle-ci peut être saisie
dans un délai de trois mois. Peuvent également saisir la Cour : l'État
dont la victime est le ressortissant, tout État mis en cause. Les juges
de la Cour, qui siège à Strasbourg, sont élus pour neuf ans par
l'assemblée consultative sur une liste de personnes présentées par les
membres du Conseil de l'Europe, chaque État présentant trois candidats.
La Cour examine s'il y a violation de la Convention et, si le droit
interne ne permet pas d'effacer les conséquences de cette violation,
elle peut accorder une satisfaction équitable à la partie lésée. C'est
le Comité des ministres qui surveille l'application des arrêts de la
Cour.
Si la Cour n'a pas été saisie, le Comité prend par un vote à la
majorité des deux tiers une décision sur la question de savoir s'il y a
eu ou non violation. Dans l'affirmative, il fixe un délai à l'État
intéressé « pour prendre les mesures qu'entraîne la décision » ; si
l'État ne se soumet pas, le Comité publie le rapport de la Commission
et donne à sa décision initiale « les suites qu'elle comporte ».
L'article 15 prévoit une possibilité de dérogation aux dispositions de
la Convention si des circonstances exceptionnelles le justifient.
L'État intéressé doit tenir le secrétaire général « pleinement informé
des mesures prises et des motifs qui les ont inspirées ».
Ce n'est qu'au bout de vingt-trois ans que la France a ratifié la
Convention (décembre 1973). Les motifs invoqués pour la
non-ratification ont changé de la IVe à la Ve République : le droit à
la liberté de l'instruction, les circonstances de la guerre d'Algérie,
le monopole de l'O.R.T.F., la durée de la garde à vue,
l'incompatibilité de l'article 16 de la Constitution française et de
l'article 15 de la Convention ont été tour à tour soulevés. Soumis à
une forte pression aussi bien internationale que nationale, le
gouvernement français a fini par proposer une ratification assortie de
réserves, notamment en refusant aux particuliers le droit de saisir la
Cour. Et ce n'est qu'en 1981 que la France a accepté le droit de
requête individuel.